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semaine. Ai-je besoin d’ajouter que les inventeurs de ce puissant engin font une exception tacite en leur faveur, qu’ils se promettent d’échapper, eux et leur traitement, à cette perpétuelle instabilité qui est à leur sens le caractère des sociétés bien réglées ? Quand ces gens-là sont en place, ils s’y cramponnent, et il est malaisé de leur faire lâcher prise ; ils ont le secret de la chaudière.

Il me paraît, monsieur, que, si la république succombait une fois de plus en France, c’est le radicalisme qui l’aurait tuée. L’agitation perpétuelle ne saurait plaire longtemps dans un pays de travail et d’épargne, où les intérêts s’accommodent mal d’un régime qui, tous les matins, remet tout en question. Les ruraux ne souffrent pas qu’on les agite trop, et il est bon de compter avec les ruraux. Tous les républicains sages le sentent bien, témoin la lettre si digne et si sensée qu’écrivait l’autre jour M. Vacherot et qui a couru les feuilles publiques. Cette lettre m’a remis en mémoire le mot d’un éminent citoyen florentin, le marquis Gino Capponi. — Le malheur des hommes, disait-il, est qu’ils ne font pas assez de cas des avantages négatifs et des vertus modestes. — Il entendait par là l’esprit de conduite, la prudence, la modération. En France, la république a pour elle la force des situations et la désunion de ses ennemis. Les républicains doivent avoir confiance en ces puissans auxiliaires qui travaillent pour eux, et leur apporter le concours de leur calme, de leur prudence, surtout de leur abnégation. Si la république se fonde en France, elle aura été fondée par des gens qui n’en voulaient pas entendre parler, et qui après de longues hésitations se décidèrent à contracter avec elle un mariage de raison. Cela se fera on ne sait comment. Règle générale : ce ne sont pas les républicains qui font les républiques, ce sont les républiques qui font les républicains. Dieu bénisse la France et la tienne en garde contre la politique de cabaret !

Agréez, monsieur, je vous prie, l’expression de tous mes sentimens de haute considération.

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ESSAIS ET NOTICES.

LES ANOMALIES MÉTÉOROLOGIQUES.


L’hiver exceptionnel que nous avons eu cette année a fourni un nouvel aliment aux discussions qui signalent depuis quelque temps l’avènement d’une école nouvelle de météorologistes. Lasse d’interroger sans résultat les documens accumulés par de patiens observateurs qui s’attachaient aux petites variations locales du temps, cette école a compris qu’il faut embrasser d’un seul regard l’ensemble des phénomènes aériens dont la surface terrestre est le théâtre et, pour ainsi dire, le champ de