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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 septembre 1871.

Allons, les choses ont marché mieux qu’on ne le pensait. Nous sommes sortis sans dommage de cette grande et ardente discussion de l’autre jour, qui nous a donné un gouvernement en faisant du chef du pouvoir exécutif un président de la république. Le 4 septembre, il ne s’est trouvé heureusement dans la France entière que quelques tapageurs désœuvrés pour célébrer ce qu’ils appellent encore le glorieux anniversaire, l’anniversaire de nos défaites, et M. le ministre des affaires étrangères vient d’annoncer à l’assemblée nationale que le troisième demi-milliard est enfin payé, que les environs de Paris et nos forts sont sur le point d’être libres, que les Allemands vont quitter nos départemens les plus voisins en même temps que le département de la Seine. Nous n’avons plus le droit de nous livrer à l’illusion présomptueuse, la France en est venue à cette extrémité d’avoir à se réjouir, — modestement et sans illumination, mais réellement, — quand elle voit devant elle un peu de paix intérieure assurée, et lorsque quatre de ses départemens échappent à la dure étreinte de l’occupation étrangère. C’est un commencement, et à voir ce que c’est que l’occupation étrangère, à calculer ce qu’il faut encore de temps et de ressources pour en venir à bout complètement, ceux qui tiennent dans leurs mains nos affaires devraient ne point détourner un instant leur esprit et leurs efforts de ces deux intérêts qui n’en font qu’un, — l’affermissement d’une situation régulière pour arriver à la libération définitive de la France. Qu’on songe bien en effet que cette libération difficile, laborieuse, ne tient point uniquement par malheur à une explosion de bonne volonté patriotique ; elle dépend en grande partie d’un régime honnête, libéral, actif, réparateur, surtout d’un régime qui ne reste pas incessamment livré au souffle de toutes les crises. Un jour M. Thiers comparait avec émotion la France à une glorieuse blessée, à une convalescente. Les convalescences ont grand besoin d’être à l’abri des secousses, et c’est ce qui a fait après tout, au