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arbres moyens et surtout des chênes déjà gros, les plus précieux de tous, car ils approchent de la maturité. En fait, à combien de forestiers n’est-il pas arrivé, en parcourant une coupe exploitée qu’ils ont balivée quelques mois auparavant, de regretter l’abandon de certains arbres gisans sur le sol, et d’éprouver à la vue de réserves rares ou trop jeunes une impression contraire à celle que leur avait laissée l’opération du balivage ! C’est que cette opération dans les coupes de taillis est aussi difficile qu’importante. Il faut y procéder lentement, en se rendant bien compte de l’avenir de chaque arbre, sans se préoccuper de l’estimation des arbres à exploiter, qui peut se faire ensuite et à part. Ainsi conduite, la marque des arbres à réserver est sans doute un long travail, mais c’est le point capital du traitement de nos taillis.

Les plus grandes de nos forêts situées en dehors des régions montagneuses sont encore soumises à ce mode de traitement. La forêt d’Orléans, qui s’étendait, il y a deux siècles, sur 70,000 hectares, qui en couvre maintenant encore 32,000, offre un exemple frappant des mauvais résultats que donne le taillis sous futaie appliqué trop longtemps sans esprit d’économie. Appauvrie de longue date, puis donnée en notre siècle à la couronne, qui y laissa continuer le traitement antérieur, elle est de nos jours tellement dépourvue d’arbres de futaie, que la restauration en présente de grandes difficultés. L’administration forestière entreprend de la convertir en futaie pleine ; c’est le plus sûr moyen de rendre à la production des bois d’œuvre ce sol analogue aux terrains de la Sologne, ingrat pour la culture agricole et parfaitement apte à la production du chêne. La forêt de Chaux, massif de 20,000 hectares situé dans la grande vallée de la Saône, aux portes de la ville de Dôle, est également traitée de temps immémorial en taillis sous futaie. Elle recouvre au milieu d’une plaine fertile une nappe d’alluvions sablonneuses et caillouteuses qui se refusent à donner des céréales, mais produisent de très bons chênes. Là encore, comme à Rambouillet, comme dans la plupart de ces forêts aujourd’hui en taillis et qui semblent providentiellement jetées au milieu des plaines pour y produire des bois que les voies de terre et d’eau distribuent à tout le pays, une réserve très nombreuse en gros arbres est indispensable pour enrichir et même pour conserver la forêt.

En dehors des bois de l’état, naturellement destinés au régime de la futaie, en dehors des bois appartenant aux particuliers, sur la statistique desquels on n’a que de vagues données, les communes et les établissemens publics possèdent en France une grande étendue de bonnes forêts. La distribution des forêts communales est très remarquable : la région de l’ouest en est dépourvue ; à peu près aussi riche que la région de l’est en bois de