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nombreuse ? La moitié des taillis appartenant à l’état est déjà en conversion sur une étendue de 270,000 hectares, et le surplus y entrera prochainement. La conversion exige toute une révolution de futaie, peut-être cent cinquante ans en moyenne. Appliquée bientôt dans ces conditions à 400,000 ou 500,000 hectares, cette opération comportera des coupes définitives qui parcourront chaque année à peu près la cent cinquantième partie de l’étendue, soit environ 3,000 hectares. Que cette réserve nous permette de recueillir dans une trentaine d’années sur chaque hectare parcouru six ou sept chênes d’un volume de 3 mètres cubes l’un, ce serait un supplément annuel de 60,000 stères de gros chênes. Ici encore le même esprit d’économie s’appliquerait naturellement aux coupes d’amélioration et autres de tout genre, et le résultat serait d’autant plus sensible. Si l’on remarque que tous les chiffres indiqués ci-dessus pour les arbres à conserver sont très faibles, il est facile d’entrevoir quelle richesse peut donner dans l’avenir cette réserve des chênes effectuée seulement dans les futaies et dans les taillis en conversion. C’est par centaines de mille mètres cubes qu’il faut l’évaluer, et il ne serait pas impossible qu’elle s’élevât dans quarante ou cinquante ans au chiffre annuel que représentent aujourd’hui nos importations de merrain.

Le traitement le plus généralement appliqué en France aux forêts d’essences feuillues est celui du taillis sous futaie. Nos taillis sont le principal et précieux champ de production où s’élaborent nos chênes. Dans les forêts soumises au régime forestier, l’étendue en est triple de celle des futaies de bois feuillus, dont la plupart sont d’ailleurs formées de hêtres. De plus les forêts de chênes que possèdent les particuliers sont traitées presque exclusivement en taillis. Si faible que puisse être la quantité de gros chênes fournie par nos taillis sous futaie, il est hors de doute qu’ils donnent la majeure partie du bois d’œuvre de chêne produit en France. Il nous importe donc, avant tout, d’augmenter et d’améliorer ce genre de production. Le taillis sous futaie présente deux avantages : il permet l’éducation des chênes à l’état isolé, d’où résulte, en même temps qu’une large cime, un développement rapide, et par suite un bois nerveux ; il comporte encore l’exploitation de chaque arbre au terme de sa maturité individuelle, âge très variable avec les différens sujets. A coup sûr, les vices inhérens à ce régime l’emportent souvent sur ces avantages précieux ; c’est là une raison de plus pour tirer de ceux-ci tout le parti possible. La première règle à suivre est de réserver indifféremment tous les chênes d’avenir, à moins qu’ils ne s’entravent dans leur végétation, ce qui n’a lieu que lorsque les cimes sont pressées l’une contre l’autre, à moins que, leur couvert étant insuffisant pour le sol, il ne soit préférable de remplacer un certain nombre de chênes par des hêtres, à moins aussi