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deux mois occasionneraient un surcroît de 28 millions; les quinze jours d’exercices de la seconde réserve coûteraient environ 15 millions. Quant aux corps indigènes, dont l’effectif est de 13,000 hommes infanterie et cavalerie, le projet du général efface du budget de la guerre les 10 millions auxquels monte leur entretien. Il les met à la charge des ressources spéciales de l’Algérie; mais, comme ces ressources sont à peine suffisantes aujourd’hui pour subvenir aux dépenses de la colonie, il faudrait nécessairement les maintenir sur le budget de l’état, si l’on jugeait que la conservation de ces corps fût une mesure de bonne politique, propre à étendre et à consolider notre influence dans nos possessions africaines.

Le général Faidherbe élimine encore du budget de la guerre les dépenses de la gendarmerie. Il voudrait que cette troupe, dont il ne conteste pas l’utilité, fût à la solde des départemens. Ce serait une économie de 25 millions. Ne nous faisons pas cependant d’illusions. Cette économie ne serait, à vrai dire, qu’un déplacement de charge dont ne saurait profiter le contribuable, toujours obligé de payer, au nom de l’état ou du département, un corps de police indispensable.

Enfin, avec les dépenses affectées aux deux réserves, aux corps indigènes et à la gendarmerie, on porte à 365 millions le chiffre général du budget de la guerre. Moyennant cette somme, on pourrait, au moment du péril, mettre sous les armes 1,700,000 hommes. Avec une force semblable bien organisée, on peut pourvoir à toutes les éventualités. La question est de savoir si ces troupes auront la solidité nécessaire; c’est ce que peuvent seuls juger les gens du métier. Ce qu’il nous appartient de constater, c’est que ce système est relativement économique, puisqu’il fournit un grand nombre d’hommes avec une dépense inférieure de quelques millions à la dépense actuelle. En effet, les dépenses de l’armée figurent au dernier budget de la guerre pour 370 millions; on économiserait donc 5 millions.

Cette économie pourrait s’étendre encore, si les nécessités financières ne permettaient pas de donner à l’organisation militaire tout son développement. Le système à cet égard est doué d’une élasticité commode. On peut gagner 60 millions en ne retenant sous les drapeaux pendant deux ans que la moitié de la classe, et en n’imposant à l’autre moitié que des exercices pendant six mois. Il serait encore possible d’épargner quelques millions en abrégeant le temps d’exercices des deux réserves, ou en n’y convoquant pas tous les hommes; mais il faut prendre garde par la poursuite exagérée des économies de ruiner le système et de détruire toute espèce d’armée. Sans souhaiter ni sans rechercher la guerre, dont nous venons de subir toutes les douleurs, il est sage toutefois de la prévoir, de prévenir