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nécessaires, rien n’est plus politique que de chercher à maintenir au pouvoir la sagesse et l’habileté, quand on a eu la bonne fortune de les trouver réunies dans un homme qui est l’honneur de son pays.

On peut essayer de résoudre ce problème ; il ne faut pas cependant se faire illusion : ce ne sera pas aussi facile qu’on le croit, par cette raison bien simple qu’en l’absence de toute constitution définitive c’est toujours l’esprit de bonne conduite et de bonne volonté qui règne et gouverne en dehors de toutes les combinaisons momentanées qu’on s’impose. Le nom pourra changer, la situation restera à peu près la même, en ce sens que demain comme hier elle reposera sur le concours permanent, nécessaire, toujours renouvelé des deux forces que les circonstances ont rapprochées pour le bien du pays. Au point où nous en sommes, on conçoit aussi peu l’assemblée sans M. Thiers que M. Thiers sans l’assemblée. C’est l’alliance de ces deux forces qui nous a rendu ce que nous avons de paix publique, qui a ramené la sécurité, la confiance, l’illusion de quelque chose de définitif dans le provisoire. C’est par l’alliance de ces deux forces que la France peut reprendre une attitude devant l’étranger, renouer des relations et se remettre à suivre avec fruit pour elle-même, peut-être aussi avec utilité pour d’autres, tous ces mouvemens qui s’accomplissent en Europe, en Allemagne comme ailleurs. C’est par l’alliance de ces forces enfin et seulement par cette alliance qu’elle peut arriver à résoudre tous ces problèmes qui deviennent chaque jour plus pressans, qui sont la condition première de sa renaissance parmi les peuples, la réorganisation de son armée, la réorganisation de ses finances, la réorganisation de tout ce qui peut renouveler sa puissance intérieure en rouvrant les sources de sa vitalité politique et morale.

Que M. Thiers et l’assemblée ne soient pas toujours d’accord dans la recherche des moyens les plus propres à réaliser cette œuvre de réformation nationale, ce n’est point certainement impossible, et il faudrait bien de la naïveté pour n’avoir point prévu d’inévitables conflits d’opinions. Non, M. Thiers et l’assemblée ne sont pas toujours d’accord, ils ne s’entendront pas toujours, et ils ne doivent pas moins rester unis. On fera ce qu’on a fait ces jours derniers, lorsque l’assemblée, paraissant disposée à faire peser sur le pays tout entier l’indemnité des dommages causés aux départemens envahis, s’est trouvée en présence du chef du pouvoir exécutif défendant les intérêts du trésor. On a pris quelques jours, et on trouvera sans doute une transaction. Ce qui est bien clair, c’est qu’il y a un certain nombre de questions dont la solution est désormais urgente, impérieuse ; il n’y a plus de temps à perdre.

La réorganisation de nos forces militaires est surtout une de ces questions qui s’imposent d’elles-mêmes. Depuis quelques mois, toutes les opinions ont pu se produire, toutes les polémiques sont ouvertes, tous les systèmes ont plaidé leur cause, sans parler des faits qui ont de leur