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cette voie. Et, de son côté, le ministre de l’instruction publique s’est-il mis à l’œuvre en homme persuadé que tout est à faire aussi dans le domaine qu’il gouverne ? M. Jules Simon a dû s’en préoccuper ; il n’avait pas, quant à lui, à reprendre Paris, et il n’était pas retenu par toutes les considérations, par tous les détails d’une transition toujours difficile. Il n’avait qu’à montrer qu’un esprit nouveau devait animer désormais l’éducation publique à tous les degrés. Nous avons lu sans doute dans ces derniers mois quelques circulaires honnêtement pensées et fort élégamment écrites. Le ministre de l’instruction publique a même publié tout récemment, si nous ne nous trompons, une note assez attendrie sur la situation faite aux professeurs de Paris par les événemens que nous traversons depuis un an. Rien de mieux assurément, rien de plus légitime et de plus convenable que la sollicitude de l’administration pour les intérêts matériels des professeurs ; mais enfin, et les professeurs eux-mêmes ne sont pas les derniers à le reconnaître, il y a des heures où il ne s’agit pas précisément de cela, où un homme qui a dans ses mains une part de pouvoir est tenu de faire sentir autrement son action. Nous parlions de la vertu du service obligatoire pour discipliner la nation ; en réalité, c’est dans les écoles de tout genre, dans l’éducation publique à tous les degrés que doit se préparer désormais cette initiation aux mœurs sévères de la vie disciplinée, et pour cela on n’a pas besoin de lois nouvelles, de réformes organiques de l’enseignement. Ces réformes et ces lois viendront à leur heure ; elles seront certainement votées sans aucun esprit méticuleux par l’assemblée. Jusque-là, il y a une œuvre toute simple, toute pratique et qui n’est pas moins pressante, c’est de faire comprendre aux maîtres de toute sorte, aux directeurs de l’éducation publique, l’importance du rôle qu’ils ont à remplir, c’est de faire rentrer la discipline là où elle n’est plus par malheur depuis longtemps et de ramener au devoir ceux qui s’en écartent, c’est enfin d’imprimer à l’enseignement tout entier, par une impulsion de tous les jours, une direction conforme aux nécessités nouvelles du pays, M. Jules Simon, nous devons le supposer, n’a point négligé cette partie de sa mission. Nous apprendrons sûrement un de ces jours tout ce qu’il a fait déjà, dans la mesure de ses pouvoirs, pour commencer à relever l’éducation nationale, car enfin il est bien clair que, pour rester un bon ministre de l’instruction publique, il ne suffirait pas d’être caressant pour tout le monde, même pour ceux qu’on frappe, ou de se précipiter avec enthousiasme sur les pas de M. Thiers descendant de la tribune après un de ces discours par lesquels l’illustre chef du pouvoir exécutif gagne des batailles pour son cabinet.

Ah ! si M. Thiers avait le temps de s’occuper de l’instruction publique ! mais il n’a pas le temps, il a sur les bras la politique générale, la di-