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il forme sa coquille; mais on peut répondre avec M. W. Carpenter que le calcaire et la silice existent à l’état de dissolution dans l’eau qui pénètre le protozoaire, et que celui-ci ne fait que retenir ces substances et les déposer au dehors, tandis que, pour produire de toutes pièces une substance albumineuse ou simplement protoplasmique, il faut nécessairement une décomposition chimique suivie d’une recomposition d’une nature spéciale, et jusqu’ici aucun fait n’autorise à croire que cette opération soit possible en dehors de l’influence de la lumière, c’est-à-dire autrement qu’à la façon des végétaux. Si donc il était concevable, ce qui n’est pas démontré, que les protozoaires les plus imparfaits fussent parfois susceptibles d’élaborer directement des composés organiques, ils deviendraient par cela même de véritables végétaux, et dès lors se trouveraient soumis aux lois qui gouvernent cette partie du domaine de la vie. Ici heureusement les recherches de l’expédition anglaise laissent entrevoir une solution qui dissipe presque entièrement les obscurités de la question. Déjà M. Wallich, et plus tard le professeur Wyville Thompson, s’étaient attachés à démontrer qu’au sein de la mer il n’y avait, à proprement parler, ni putréfaction, ni destruction immédiate des corps abandonnés par la vie. Imbibés par l’eau, qui fait partout équilibre, leur désagrégation s’opère d’une façon insensible. Chez eux, point de fermens propres à dissoudre la trame élémentaire; l’eau pénètre et remplit les moindres interstices : c’est elle qui reçoit et qui garde la matière organique, délayée et diffluente, mais encore atomiquement combinée, susceptible par conséquent de nourrir les êtres vivans chez qui elle est introduite. Une dilution de ce genre se trouve en voie de formation perpétuelle au sein de la mer; elle résulte du résidu flottant de tous les organismes aquatiques, de ceux que charrient les fleuves et particulièrement de ceux de la zone littorale, si richement peuplée dans un espace continu dont la largeur est évaluée à plus d’un mille. L’analyse des eaux de l’Atlantique, puisées à des hauteurs différentes, a permis d’y constater la présence d’une proportion sensible de matière organique fortement azotée jusqu’au-delà de 1,300 mètres. C’est sans doute à l’aide de cette dilution que se nourrissent les protozoaires. Ces animaux, sans ouverture buccale ni cavité intérieure régulière, retiennent par imbibition les principes tout formés contenus dans l’eau qui les baigne, de même qu’ils sécrètent au dehors le test calcaire ou siliceux de leur coquille.

Il ne suffit pas aux animaux sous-marins de pouvoir se nourrir, il leur faut encore respirer, et l’on comprend difficilement au premier abord d’où peut leur arriver l’oxygène dont ils ne sauraient se passer. Il est vrai que la respiration des animaux inférieurs est peu