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cher un important différend entre les patrons et les ouvriers. À l’heure qu’il est, d’après des renseignemens qui nous sont fournis par des personnes compétentes, nous, pouvons évaluer à quarante environ le nombre des conseils qui fonctionnent avec succès dans divers centres industriels de l’Angleterre.

Le conseil d’arbitrage institué par M. Rupert Kettle à Wolverhampton sur des principes qui s’écartent un peu par certains détails de ceux qu’a suivis. M. Mundella a également produit d’heureux résultats. Il date de 1864. Les entrepreneurs de bâtiment et les ouvriers, charpentiers et menuisiers, ayant entre eux de graves difficultés, recoururent à M. Kettle pour juger leur différend. Il leur proposa de nommer six délégués patrons et six délégués ouvriers auxquels il s’adjoindrait comme treizième ; ils s’entendraient sur le dissentiment, puis constitueraient pour l’avenir un conseil d’arbitrage permanent. On commença par rédiger un tarif de salaires valable pendant un an ; chaque patron dut en donner une copie aux ouvriers qu’il engagerait, et en afficher un exemplaire dans ses propres bureaux. Le tarif, valable du 1er mai au 30 avril de l’année suivante, représentait uni véritable contrat conclu entre l’ouvrier et le patron. Toute difficulté relative à l’application ou à l’interprétation de ce contrat devait être portée devant le conseil. Un comité composé de deux de ses membres s’efforcerait, d’abord de concilier les différends ; s’il s’y réussissait pas, le conseil serait réuni. Les membres du conseil sont de véritables juges ; les parties doivent se soumettre aux décisions prononcées, et, comme cette obligation est expressément stipulée, dans le tarif des salaires, qui est la base du contrat entre ouvriers et patrons, l’arbitrage du conseil a force de loi, et pourrait en cas de résistance être rendu exécutoire par les magistrats du comté. Observons cependant, que le jugement d’arbitrage, en tranchant des questions relatives au prix de la main-d’œuvre ou aux conditions du travail, telles que la durée de la journée, les heures de repas, le congé du samedi, etc., n’enchaîne l’un à l’autre ni l’ouvrier, ni l’entrepreneur. Le contrat entre l’ouvrier et le patron est toujours résiliable, dans les vingt-quatre heures, et, si l’une des deux parties n’est pas satisfaite de l’autre, elle peut s’en séparer. La convention faite, entre elles porte seulement que dans le cas où l’ouvrier veut continuer à travailler pour le patron, et le patron à garder l’ouvrier, aucun d’eux ne peut, soulever de réclamations sur le tarif ou les conditions du travail sans les soumettre an conseil d’arbitrage, qui les juge, souverainement, et, nulle modification ne saurait être exigée avant le 1er mai de chaque année.

Ouvriers et patrons contractent donc avec l’assurance que pendant