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dans cette contrée d’une belle antilope jaune, plus grande que l’antilope à goitre, d’un gros bœuf sauvage noir, qu’on ne rencontre point ailleurs, et peut-être du fameux mi-lou, dont nous avons donné une description[1]. Malheureusement, pense l’infatigable lazariste, l’exploration de ces lieux inconnus et inhospitaliers ne serait possible qu’à un groupe de plusieurs Européens, accompagnés de Chinois fidèles et pourvus de ressources pécuniaires considérables. Il est donc probable qu’il s’écoulera de longues années avant qu’un Européen puisse s’aventurer dans cette région ou songe même à visiter les montagnes abruptes de Mou-pin. À la fin du mois de décembre 1869, l’abbé David se mettait en route pour les états barbares du nord-ouest, et il nous apprenait que le yak est en abondance dans ces contrées. On en distingue deux variétés, plus probablement deux espèces, car les produits de leur union, est-il affirmé, demeurent stériles à la première ou à la seconde génération. — Ici s’arrêtera le récit des travaux de l’un des plus admirables explorateurs scientifiques qu’on puisse citer. Les collections de plantes et d’animaux de la principauté de Mou-pin, formées pendant l’année 1869, sont arrivées au Muséum d’histoire naturelle au printemps de l’année 1870. Les objets que des recherches ultérieures ont procurés ne sont pas encore parvenus, et le savant lazariste, épuisé par les fatigues et par la maladie, a été contraint de venir chercher le repos sur les rivages d’Europe.


III.

Dans l’espace d’un quart de siècle, un prodigieux changement s’est opéré relativement à la connaissance d’une grande partie de l’Asie. Il y a peu d’années encore, la Chine et les confins du vaste empire, au nord et à l’ouest, devaient être presque passés sous silence, lorsqu’on s’occupait des caractères physiques des différentes régions du monde ou de la distribution des êtres à la surface du globe : Aujourd’hui on est de ce côté en possession d’élémens de comparaison déjà très satisfaisans, et, si l’œuvre de recherche est loin d’être achevée, elle est du moins fort avancée. Longtemps attristés d’une ignorance qu’il fallait subir, les hommes d’étude ont bientôt profité des événemens qui modifiaient les rapports des Européens avec les Chinois pour apprendre tout ce qui était possible sur le vaste pays jusqu’à nos jours soustrait à l’investigation scientifique. Les uns allèrent recueillir les plantes et les animaux, les autres, désignant les sujets d’observation les plus intéressans, s’at-

  1. Voyez la Revue du 15 février, p. 735.