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par un plébiscite l’annexion définitive de ce qui restait des provinces pontificales au royaume italien, en ajournant provisoirement toutefois la translation des pouvoirs politiques, gouvernement et assemblée, dans la ville éternelle, et depuis ce moment le parlement de Florence en est à délibérer sur la situation, sur les garanties d’indépendance par lesquelles l’Italie entend remplacer, au profit du saint-siège et de l’église, la souveraineté territoriale ou le pouvoir temporel. Le pape a protesté naturellement, et il a plus d’une fois renouvelé ses protestations ; il n’a pas voulu néanmoins quitter Rome, il s’est borné à se renfermer au Vatican, où il se considère lui-même comme un captif, de sorte qu’il y a pour le moment dans la ville de saint Pierre deux pouvoirs fort peu réconciliés. Pie IX, après être resté jusqu’ici auprès de la confession des apôtres, au siège naturel du pontificat, se décidera-t-il à s’éloigner lorsque le gouvernement italien voudra se transporter définitivement à Rome ? S’il n’est point parti tout d’abord, sous le coup de l’entrée des Italiens et de la première prise de possession, c’est qu’évidemment il est peu porté à une résolution extrême, et pour le pousser à cette rupture, à cette expatriation du pontificat, il faudrait des actes que l’Italie s’interdira sans nul doute. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas moins une des plus grandes révolutions qui s’est accomplie à nos portes, presque sans bruit, pendant que nous étions à disputer notre existence nationale. Disons mieux, c’est une question dont les événemens ont pu brusquer la solution, mais qui devait un jour ou l’autre arriver à son terme.

En réalité, le pouvoir temporel n’avait plus qu’une ombre de vie, il ne pouvait plus se soutenir par lui-même. Si on voulait le maintenir, il fallait y songer plus tôt, il fallait le sauver des premières atteintes, et cela n’eût pas encore suffi, il aurait fallu lui communiquer une vie nouvelle, une force propre qui l’eût préservé peut-être de l’inévitable déclin. Au point où il en était venu, il n’était plus qu’une vaine et précaire garantie ; il fallait de la bonne volonté pour prendre au sérieux cette souveraineté territoriale, et, les choses étant ainsi, l’unique question était de savoir s’il n’y aurait pas un autre moyen de remplacer cette garantie devenue illusoire par quelque combinaison propre à concilier l’indépendance du saint-siège avec les aspirations nationales de l’Italie. Après tout que faut-il ? Il faut que le pape soit pleinement indépendant dans son action spirituelle, dans la manifestation de son autorité religieuse, dans ses rapports avec les nations catholiques. L’Italie, laissée seule par les événemens en face du pontificat, a essayé de résoudre le problème par cette loi que la chambre des députés a votée il y a quelque temps, que le sénat à son tour vient de discuter et d’adopter en la modifiant légèrement dans un sens un peu plus libéral au point de vue de la situation personnelle du pape, dans un sens un peu plus restrictif au