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jusqu’à la seconde enquête de 1860, déjà citée plus haut, qu’on interroge l’histoire des nombreuses grèves écloses parmi les ouvriers parisiens en vue de la hausse du salaire, qu’on tienne compte enfin des augmentations que l’accroissement du prix des choses avait amplement légitimées, et on aboutit à une conclusion d’une incontestable évidence. Oui, la suite des faits établit que, dans la capitale, pour les industries de toute nature prises en bloc, et pour la masse des travailleurs, le salaire journalier des hommes oscille entre 4 francs et 5 francs. La moyenne la plus vraie est donc de 4 fr. 50 c. par jour. S’il y a des situations plus favorisées, — même sans parler des tâches tout à fait exceptionnelles, — dans les arts de précision, dans la gravure, le dessin industriel, l’imprimerie, dans certaines applications de métaux précieux, dans certaines applications de l’ameublement, de la carrosserie et de quelques autres métiers, il y en a aussi beaucoup qui le sont moins dans l’alimentation, dans les fils et tissus, dans les articles de Paris, dans les industries diverses. Apprenons seulement que cette moyenne de 4 francs 50 centimes doit paraître à l’abri de toute exagération, surtout quand on réfléchit qu’elle s’applique également aux sous-entrepreneurs, aux ouvriers-patrons travaillant seuls chez eux, et dont le gain ne peut être estimé à moins de 6 à 10 fr. par journée. — Pour les femmes, la moyenne qu’il convient d’adopter, à cause de l’accroissement des prix dans diverses branches de leur besogne, notamment dans la couture, où la machine à coudre n’a pas encore amélioré toutes les existences, ne saurait dépasser 2 francs par jour. — Quant aux enfans, si l’on songe que les apprentis, pour le plus grand nombre, ne reçoivent rien, que les plus jeunes enfans, surtout parmi les filles, gagnent bien peu, on acceptera sans difficulté pour tous la moyenne de 75 centimes par jour.

Les trois unités réclamées, les voilà donc telles que les donne l’examen des faits les plus contraires. Nous ne les avons demandées qu’à l’observation ; il en sera de même pour le rapport à établir entre le nombre des hommes, celui des femmes et celui des enfans. Ici toutefois reviennent des calculs rigoureux, au moins dans la plupart des professions. En 1860, d’après le travail de la chambre de commerce, la phalange ouvrière, — objet d’un recensement détaillé, — se décomposait en 303,627 hommes, 119,684 femmes et 19,742 enfans. Or il est certain que la proportion n’a que peu ou point varié depuis lors. L’ancien rapport doit être maintenu, sauf sur quelques points isolés. D’après ces données, la masse de 385,850 travailleurs entièrement dépouillés par la guerre civile de leurs moyens de vivre engloberait 270,627 hommes, 101,468 femmes et 12,980 enfans. Pour chaque journée de travail, les hommes au-