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faire : nous n’essaierons pas d’indiquer même en gros ce qu’elles comprennent ; on n’abrège pas un abrégé, quelque considérable qu’il soit. Désirez-vous connaître l’intérieur d’un riche ? Entrez dans la maison de Mamurra et ne vous perdez pas dans les prothyrum, les atrium, les carvædium, les impluvium, etc. Autant de noms qui feraient fuir les lecteurs superficiels ; mais la maison de Mamurra n’est ouverte qu’à ceux qui ont la résolution sérieuse de s’instruire. On en pourrait dire, autant du détail infini des tavernes ou boutiques, des auberges de tous les étages, des ateliers. M. Dezobry s’est proposé d’être utile, et, en vue de ce dessein qu’on ne saurait qu’approuver, il y a mis du sien le moins qu’il a pu ; il le dit lui-même en s’appliquant avec une modestie incontestable cette phrase que Montaigne a écrite non sans coquetterie : « J’ay seulement faict icy un amas de fleurs estrangières, n’y ayant fourny du mien que le filet à les lier. » Le filet de M. Dezobry est la description sous forme de lettres par son voyageur. L’abbé Barthélémy avait fait plutôt un tableau historique et les détails descriptifs où il entre peuvent à peine compter pour des documens archéologiques. On voit par ce rapprochement du fond des choses, aussi bien que par celui de la forme, que M. Dezobry, tout en. empruntant à son devancier l’idée de son voyageur, s’est efforcé de suivre une voie toute différente, et de réaliser une pensée qui n’est pas dut tout la même.

On peut suivre dans notre histoire littéraire la marche progressive des ouvrages analogues à celui dont nous parlons ici. Destinés les uns et les autres à l’éducation de la jeunesse, ils commencent par encadrer dans la forme d’un roman des leçons de morale, de philosophie, de politique, et ils finissent par mettre cette sorte de composition au service d’une science ou d’une branche de la science très limitée. Naturellement, à mesure que le but pratique prend une importance exclusive, L’objet littéraire s’efface de plus en plus. Il ne faut pas s’étonner que la liste de ces livres, souvent modestes en proportion de leur utilité, commence par une œuvre où le génie a laissé son empreinte. Le Télémaque de Fénelon est un cours complet d’éducation royale. Les Voyages de Cyrus, par le chevalier de Ramsay, reprennent le même sujet, mais en y ajoutant l’étude de la géographie ancienne et de la chronologie. Le Séthos de Terrasson suit les traces des précédens et recommence l’institution d’un prince, en y ajoutant tout ce qu’il est permis de connaître et même de deviner sur l’Égypte et l’Afrique ancienne. L’abbé Barthélémy s’est proposé d’enseigner l’histoire et la littérature grecques, non à des princes, mais à tout le monde, et M. Dezobry, qui n’a pas l’ambition de rivaliser avec ces écrivains, mérite pourtant une mention après eux pour avoir enseigné aux jeunes gens l’archéologie romaine.

L’édition actuelle présente plusieurs changemens et des additions heureuses. Les additions se composent de gravures nouvelles, de texte