Page:Revue des Deux Mondes - 1871 - tome 92.djvu/585

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

éruption exanthématique à la peau. Ceux qui ont vu des malades de l’épizootie de 1865-1866 et de celle de 1870-1871 ont pu constater entre les deux épizooties d’assez grandes différences. Dans la maladie régnante, om remarque une grande prostration des forces, une diminution presque complète de la sensibilité, une marche foudroyante du mal, ce qui s’explique sur beaucoup d’animaux par les fatigues, la misère, l’épuisement. Des bêtes qui, à un moment donné, ne me paraissaient que légèrement affectées étaient mortes, ou mourantes deux heures après. La bave qui s’écoule de la bouche est moins abondante qu’elle ne l’était chez les animaux atteints en 1866. Il en est de même du mucus qui s’écoule des naseaux. Quant aux larmes, d’ordinaire elles manquent totalement. Dans les abattoirs et les beuveries de La Villette, où j’ai examiné un jour peut-être cent malades, je n’ai constaté ce symptôme sur aucun. Le symptôme qui frappe surtout, c’est le trouble des phénomènes respiratoires, la dilatation des naseaux : les angles supérieurs de ces ouvertures se relèvent comme consulsivement à chaque inspiration. Ces symptômes constituent un caractère prédominant sur la plupart des animaux malades. Je les ai remarqués sur les vaches de l’hospice des Enfans-Assistés, qui étaient vigoureuses et bien soignées, comme sur les bêtes en piteux état des troupeaux de ravitaillement.

Tous les remèdes-connus[1] et tous les procédés de traitement imaginables ont été employés contra la peste bovine. Les vétérinaires les plus expérimentés, même les médecins les plus illustres, s’en sont occupés, et tout ce qu’on a essayé a été inefficace. Quel est donc ce triste résultat ? se demandait Paulet, après avoir apprécié les effets de tous ces moyens, il n’y a donc pas de ressources contre un pareil fléau ! — Tous les observateurs consciencieux ont reconnu que es cures constatées étaient dues plutôt à des efforts de la nature qu’aux remèdes employés. Les Hollandais, qui ont tant eu à

  1. Nous avons cité les principaux à l’occasion des épizooties contre lesquelles ils ont été employés. Un médicament puissant inconnu des anciens, l’acide phénique, qui agit avec la plus grande énergie sur les êtres organisés, a été essayé, mais sans succès, par les Anglais en 1866. Le docteur Déclat le fait administrer dans ce moment comme agent préservatif et curatif à Paris et en Bretagne. Sans être concluans, les faits observés démontrent que les expériences offrent un grand intérêt scientifique. Les Allemands, qui ont une très grande expérience de tout ce qui se rapporte à la peste bovine, sont tellement convaincus qu’il est dangereux, de traiter les animaux malades, qu’ils défendent même la vente des remèdes conseillés pour cet usage. Un arrêté publié à Nancy par ordre du gouverneur de la Lorraine, von Bonin, contient la disposition suivante : « Art. 16. — La vente, l’emploi et la recommandation des remèdes et des préservatifs contre la peste devront être interdits. Les moyens de désinfection ne sont pas considérés comme remèdes et pourront être appliqués. »