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nément en cet endroit par les fissures d’un sol rocailleux et dénudé, et qui caractérisent ce que l’on appelle un terrain ardent. À l’époque où la route était très fréquentée, les voyageurs s’arrêtaient ordinairement en grand nombre à Pietra-Mala pour y prendre quelques heures de repos et pour voir de près les foyers naturels. De brillans équipages ont stationné souvent aux portes de l’auberge, des notabilités politiques en ont occupé les appartemens ; mais aujourd’hui le souvenir de tous les grands personnages qui ont passé dans cette maison est à peu près effacé : l’hôtellerie de Pietra-Mala ne restera célèbre que grâce au séjour que Volta y fit en 1780, et aux expériences qu’il y entreprit pour démontrer la nature gazeuse des émanations du terrain ardent voisin. La chambre qu’habita le savant physicien, et qu’il transforma pendant quelques jours en un laboratoire de chimie, mériterait d’être visitée avec un religieux respect, car les expériences qu’il y a effectuées sont pour ainsi dire la consécration de toutes les œuvres de cet homme de génie, qui a inventé l’électrophore, l’électroscope condensateur, l’eudiomètre, et découvert la composition du gaz des marais. La description du terrain ardent de Pietra-Mala va nous amener tout naturellement à raconter l’histoire du séjour de Volta en ce lieu, les travaux auxquels il s’y livra sur place, et les expériences préliminaires qui avaient déterminé son voyage. Ses premières recherches scientifiques avaient porté sur l’électricité. Désireux de remplacer la machine électrique, instrument volumineux et d’un prix élevé, par un appareil plus simple et moins cher, il avait été conduit à inventer l’électrophore. Curieux de déterminer la quantité variable d’électricité qui se trouve dans l’air, il avait construit l’électroscope condensateur. Ayant répété dans son cours les expériences passablement confuses de Galvani sur les mouvemens développés par le contact des métaux avec les muscles et les nerfs des grenouilles, il avait imaginé la pile, et fait ainsi peut-être la plus belle et sans contredit une des plus fructueuses inventions de nos temps modernes. Toutefois, malgré l’importance de ses découvertes relatives à l’électricité, Volta était loin de se borner exclusivement à cette partie de la physique. Les problèmes discutés par les autr.es savans de son temps excitaient toujours son attention : c’est ainsi qu’à la suite d’une lettre de son ami Guiseppe Campi et d’entretiens qu’il eut avec lui, il fut amené à s’occuper d’études chimiques sur la nature des gaz combustibles naturels. Guiseppe Campi lui ayant raconté que sur les bords du Lambron il existait un dégagement de bulles gazeuses qui prenaient feu au contact d’un corps enflammé, Volta, vivement intéressé par ce récit, résolut aussitôt d’entreprendre l’étude du phénomène en question, bien qu’il appartint plus spécia-