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JOURNAL D’UN VOYAGEUR


PENDANT LA GUERRE




DERNIÈRE PARTIE[1]




Nohant, 1er janvier 1871.

Pas trop battus aujourd’hui ; on se défend bien autour de Paris, Chanzy tient bon et fera, dit-on, sa jonction avec Faidherbe, que je sais être un homme de grand mérite. Bourbaki dispose de forces considérables. On se permet un jour d’espérance ! C’est peut-être le besoin qu’on a de respirer ; mais que peuvent d’héroïques efforts, si les causes profondes d’insuccès que personne n’ignore et que nul n’ose dire augmentent chaque jour ? — Et elles augmentent !

Pour mes étrennes, Aurore me fait une surprise ; elle me chante une romance que sa mère lui accompagne au piano, et elle la chante très bien. Que c’est joli, cette voix de cinq ans !

2 janvier.

On nous dit ce matin qu’une dépêche de M. Gambetta est dans les mains de l’imprimeur, qu’elle est très longue et contient des nouvelles importantes. Nous l’attendons avec impatience, lui faisant grâce de beaucoup de lieux-communs, pourvu qu’il nous annonce une victoire ou d’utiles réformes. Hélas ! c’est un discours qu’il a prononcé à Bordeaux et qu’il nous envoie comme étrennes. Ce discours est vide et froid. Il y a bien peu d’orateurs qui supportent la lecture. L’avocat est comme le comédien, il peut vous émouvoir,

  1. Voyez la Revue des 1er et 15 mars.