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De ce vieux caporal mystique
Qui rêve sang lorsqu’il a bu.

Si tu par les comme Guillaume,
C’est aux soldats, devant le feu ;
Ton Dieu n’est déjà plus son Dieu,
Ni son royaume ton royaume.

Tu sais, même au sein des combats,
En restant prince légitime,
Distinguer l’honnête du crime,
Ce que ton père ne sut pas.

L’esprit des temps à ta jeune âme
Parle nuit et jour, et lui dit
Que son Bismarck est un maudit
Et son Moltke un pillard infâme,

Et que tu seras puni, toi,
Pour avoir, sans horreur ni peine,
Signé ce pacte de la haine
Liée à la mauvaise foi.

Il te dit que l’âge où nous sommes
À des lois qu’on ne franchit point,
Et que mettre le sabre au poing
Ne fait pas qu’on cesse d’être hommes !

Or se complaire méchamment
À multiplier les tueries,
N’avoir jamais pour théories
Que pillage et bombardement,

Activer à flots de résine
Les toits qui ne flambent assez,
Enterrer vivans les blessés,
Voler celui qu’on assassine,

Non, quand devraient tous les soudards
Rassemblés au camp de Versailles
Faire sonner mes funérailles
Et me rendre morte aux césars,

Quand devraient, dans leur clameur vaine,
Tous vos métaphysiciens,
Les jeunes comme les anciens,
Hurler : l’Alsace et la Lorraine !

Quand, par ruse et par trahison,
Devraient tomber toutes mes villes,