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Les carnassiers sont nombreux dans les montagnes, surtout en dehors de la grande muraille : l’ours du Thibet est assez commun, le blaireau n’est pas rare, le loup ordinaire est de tous côtés répandu à l’excès de l’avis des Chinois et des voyageurs ; le renard ne vient que rarement dans la plaine ; le renard à ventre noir est connu partout dans le pays, le petit renard jaune (Canis corsac), qui vit en Sibérie et dans la Mongolie, se montre dans les montagnes du Pe-tche-li ; l’isatis (Canis lagopus), partout cité comme l’animal des plus froides régions de l’Europe et de l’Asie, descend de la Mantchourie dans les hivers rigoureux. Ce ne sont pas les plus redoutables carnassiers du nord de la Chine. Le tigre séjourne et se multiplie dans les forêts de la Mantchourie, et les visites de ce fauve sont toujours à craindre dans la province de Pe-tche-li. « Ces jours-ci, écrit le père David dans sa correspondance, il en parut six dans nos montagnes du nord, où ils ont exercé de grands ravages. Un de nos chrétiens qui leur donna l’éveil en tirant un coup de fusil a été dévoré. » La panthère et l’once viennent jusqu’à peu de distance de Pékin. Le putois de Sibérie est commun même dans les maisons de la ville, tandis que le putois ordinaire ne se trouve que vers la Mongolie. On voit encore par hasard la loutre du côté de Takou ; l’espèce a été presque détruite par les Chinois : on sait qu’elle n’a guère été plus épargnée en Europe.

Il existe un certain nombre de rongeurs dans le Pe-tche-li, et plusieurs de ces animaux diffèrent de ceux du même genre qu’on a observés en d’autres parties du monde. Dans la plaine, au voisinage même de Pékin, vivent des campagnols ; dans les endroits sablonneux et sur les collines, des gerboises et des gerbilles[1]. Des rongeurs d’une physionomie étrange, qui fouissent comme les taupes et qui sont aveugles comme elles, se rencontrent en Orient. Buffon a donné une longue description du rat-taupe répandu dans l’Europe méridionale et dans l’Asie-Mineure ; des espèces particulières du même groupe creusent leurs galeries aux environs de la grande capitale chinoise et sur les pentes des montagnes du côté de la Mongolie.

Aux mêmes lieux établit sa demeure un petit animal à pelage fauve, appartenant au genre des spermophiles. Plusieurs sortes d’écureuils se trouvent dans les localités un peu boisées ; notre espèce d’Europe se voit de temps à autre dans les massifs d’arbres verts de la sépulture impériale, et les individus vivans qui plaisent singulièrement aux Chinois se vendent à très haut prix dans la ville de Pékin ; un écureuil d’un gris cendré avec le bout de la queue

  1. Les espèces inconnues avant les recherches du père Armand David ont été décrites par M. Alphonse Milne Edwards.