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utilisée par les riverains, enfin que les usiniers, sauf les droits acquis, ne jouissent pas de privilèges refusés aux autres riverains. Ce sont là des vœux auxquels on attache une grande importance, et qu’il ne faudra pas légèrement rejeter. D’autre part, la liberté du commerce de la boucherie, bien que proclamée par un décret du 24 février 1858, existe en fait bien moins qu’en théorie. Des mesures complémentaires sont vivement réclamées ; telles seraient l’abrogation de l’article 30 de la loi de 1791, qui laisse aux maires la faculté d’appliquer la taxe de la viande, — la levée de l’interdiction qui s’oppose au colportage de la viande, lequel n’offrirait certes pas plus d’inconvéniens dans la pratique que le colportage du poisson ou de telles autres denrées, — la restitution au commerce des halles et marchés du régime du droit commun, — l’abolition du privilège du factorat, de la vente à la criée obligatoire, en un mot de toutes les dispositions qui ont pour objet d’empêcher les approvisionneurs d’adopter le mode de vente qu’ils préfèrent ou de recourir à des intermédiaires de leur choix. Il existe un terrible écart entre le prix des animaux vendus sur pied par le cultivateur et le prix de ces mêmes animaux dépecés dans les boucheries ; par la seule vertu du commerce libre, il arrivera que le bénéfice du premier vendeur sera plus élevé, et que cependant le public, qui achète la viande au détail, loin de perdre à ce changement, aura des chances d’y gagner. Ces autres vœux, émis il y a plus de vingt ans par l’ancien congrès central d’agriculture et renouvelés dans le cours de la dernière enquête agricole, ont été repris au corps législatif, pendant la session de 1870, par quelques députés qui s’étaient voués surtout à l’étude des questions d’économie rurale ; il est permis d’y faire droit sans commettre aucune imprudence. Parlerons-nous aussi des concours de boucherie ou d’animaux reproducteurs, qui, sous l’administration du second empire, n’ont guère excité que réclamations et que plaintes ? L’agriculture y souhaite des réformes radicales, et, sans avoir pu se mettre bien d’accord sur ce qu’il conviendrait de substituer aux anciens programmes, les éleveurs sont unanimes à répéter que ces programmes étaient une ironie, et ces concours au moins une inutilité. Que l’on examine donc avec soin cette question des concours et des récompenses, et que l’on assemble une commission d’hommes compétens et choisis (leurs noms sont en quelque sorte indiqués d’avance) pour régler les programmes de 1871. Il semble que, si l’on veut répondre aux désirs du pays, on devra s’inspirer beaucoup de ce qui se fait en Angleterre et en Allemagne, où ces sortes de solennités exercent une influence et donnent des résultats inconnus chez nous.