gueur, la première condition est de s’embosser à de petites distances, et comment le faire avec de lourds cuirassés calant 8, 9 et 10 mètres, quelques-uns gouvernant si mal qu’à chaque changement de route on est obligé d’appuyer le mouvement de la barre par un peu de vapeur auxiliaire ?
Nul doute que, pour mener à bien ces opérations de guerre, mieux eût valu une escadre légère, armée d’un petit nombre de gros canons à pivot et installée dans le genre des monitors américains. Moins plongée dans l’eau, plus rapide dans ses mouvemens, elle eût franchi plus aisément les passes, évité ou déjoué avec moins de peine les explosions sous-marines, atteint l’ennemi. Il n’a pas dépendu de nos marins que de meilleurs instrumens ne leur eussent été confiés ; ils se sont servis le mieux possible de ceux qui étaient dans leurs mains. Ceux qui parlent dédaigneusement de croisières maintenues pendant de longs mois dans des climats sévères et dans des mers violentes ne se font pas une idée de ce que l’homme y supporte de périls, de fatigues et de privations ; moins encore savent-ils ce que comporte d’incidens et donne de soucis un blocus étroit devant des côtes dont tous les feux sont éteints, où tous les visages sont hostiles, tous les mouvemens suspects, et d’où on ne peut tirer ni un avis ni un secours. L’action de nos flottes ainsi restreinte n’en était pas moins efficace ; elles faisaient de la besogne utile à peu de bruit, elles enchaînaient la liberté des mouvemens et l’activité commerciale des trois villes hanséatiques, aujourd’hui entrées de gré ou de force dans le giron de la confédération du nord. Bien des captures ont été la suite de cette mise en interdit de la propriété allemande ; elles frappaient si juste et causaient tant de tort à Hambourg, que le prince de Hesse recourut au mensonge pour obtenir de l’amiral Fourichon qu’il en suspendît le blocus. Toute relation a cessé des États-Unis à Brème, entre lesquels existait un service important de paquebots à vapeur. Point de ville qui ne souffrît quelques dommages : Travemunde, Swinemunde, Stralsund, n’y échappèrent pas plus que Dantzig, Kœnigsberg et Memel. Les représailles contre le commerce furent donc aussi sérieuses, aussi complètes que possible. Quant aux faits de guerre, il était difficile d’y compter ; l’ennemi s’était prudemment dérobé dès le début. On a cité pourtant une rencontre heureuse du capitaine de vaisseau Dupré, qui a coulé une corvette prussienne dans les mers de Chine. Il était question aussi d’une brillante aventure de l’amiral Penhoat dans les eaux de Jahde : jusqu’ici, le fait n’a pas été confirmé.
Est-ce à dire que nos flottes aient fait dans la Mer du Nord et dans la Baltique tout ce qu’elles auraient pu faire ? Non. Elles pou-