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misères de notre organisation française mises à nu par le courageux (et savant travail du docteur Chenu, les efforts de l’initiative privée aux États-Unis, qui partirent de rien pour aboutir à former 32,000 comités, à lever une véritable armée de femmes et à dépenser 400 millions de francs au service des blessés de la patrie.

La France est en train de se relever et de montrer aussi ce dont elle est capable sous l’aiguillon du malheur. La Société française de secours aux blessés militaires de terre et de mer, fondée en 1863, approuvée en 1866, n’avait encore, au commencement de 1870, qu’une existence obscure et des moyens restreints. Les membres d’une même famille, le duc de Fezensac, le comte de Goyon, le comte de Flavigny, présidens successifs, avec le concours de quelques membres aussi prévoyans que zélés, la soutenaient avec persévérance, sans parvenir a vaincre les défiances un peu dédaigneuses de l’armée et l’insouciance trop connue des Français, qui commencent à croire à la guerre quand la mitraille éclate. Un appel, répété par les cent mille voix de la presse au début de la guerre, fut entendu et trouva partout de l’écho. Deux mois à peine sont écoulés, et déjà la société a pu organiser et expédier seize ambulances, à Borny, Toul, Verdun, Beaumont, Attigny, Sedan, Montmédy, Mouzon, Metz, onze par ses propres ressources, cinq avec le concours de lord Hertford et des donateurs suisses, anglais, américains, hollandais et italiens. Depuis que Paris est investi, pendant que presque toutes les ambulances sont demeurées au service des blessés dans les territoires envahis, la même société, aidée par l’initiative des établissemens publics, des communautés religieuses, des particuliers, a pu préparer dans les vingt arrondissemens 217 ambulances fixes, comprenant 3,619 lits, et elle a déjà, jusqu’au 10 octobre, dépensé 2,568,254 francs, distribué plus de 72,000 kilogrammes de linge, 10,000 draps, 104,000 litres de vin. Auxiliaire de l’armée et de l’intendance, la société a en outre organisé quatre ambulances pour la garde mobile, et à toutes les sorties de la garnison de Paris elle envoie ses voitures sur le terrain de l’action pour ramasser les blessés et assister les mourans. Chaque voiture est accompagnée par un médecin, deux aides, deux délégués, un aumônier. La presse française a fondé un second service d’ambulance, moins important, mais excellent, qui rivalise de zèle et d’émulation fraternelle avec la Société internationale. La presse a réuni près de 1,500,000 fr., établi huit grands hôpitaux pour 600 lits et des ambulances volantes destinées au champ de bataille ; le comité de la presse a obtenu le concours d’habiles chirurgiens et l’assistance des frères des écoles et des sœurs de l’Espérance. — Les sociétés protestantes et Israélites dirigent d’autres