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3 mai 1848, rédigé par les généraux Schramm et Cramayel, les intendans Melcion d’Arc et Dagnan, les médecins Bégin et Alquié[1]. Assimilation complète, quant aux grades, des officiers de santé militaire aux officiers des autres corps de l’armée depuis le sous-aide, qui a rang de sous-lieutenant, jusqu’à l’inspecteur-général, qui a rang de général de brigade, fonctionnement indépendant de tout le corps, par l’action de ses chefs directs, sous l’autorité du ministre et du commandement, contrôle purement administratif de l’intendance, attributions du conseil de santé analogues à celles des comités consultatifs permanens des différentes armes, telles furent les dispositions de ce décret précis, clair, accueilli avec une immense satisfaction, et considéré comme un acte destiné à trancher définitivement un conflit déplorable ; mais ce serait bien mal connaître la France que de croire à des triomphes définitifs de la loi sur la routine : celle-ci plie et ne rompt pas. Les faits résistent longtemps aux droits, et le service de santé des armées, l’une des branches les plus accablées de règlemens qui existent dans l’administration française, n’est pas encore affranchi, même en 1870, du joug des anciennes traditions et du poids des anciens préjugés. A peine le second Napoléon était-il élu président de la république que le maréchal de Saint-Arnaud lui proposait de revenir sur le décret de 1848, que l’assemblée législative avait renvoyé à l’examen du conseil d’état. Une commission présidée par le maréchal Vaillant déclara que « l’indépendance réclamée pour le corps de santé vis-à-vis du corps du contrôle était le contraire du vrai, » que le décret du 3 mai 1848 était d’origine révolutionnaire, et ces termes très vifs servirent d’introduction au décret du 23 mars 1852, qui organisa de nouveau la subordination du corps de santé à l’égard de l’intendance, tout en consacrant quelques améliorations de solde, d’avancement, de retraite, en faveur des trois branches du corps de santé, médecins, chirurgiens et pharmaciens. Payés un peu plus largement, avancés un peu plus promptement, mais privés plus que jamais d’initiative et d’autorité, les officiers de santé recommencent la lutte. Nous allons les voir gagner pendant les guerres de Crimée, d’Italie, du Mexique, un chevron par campagne, et acheter péniblement de petits progrès par d’immenses services. A la guerre de Crimée correspond le décret du 12 juin 1856, préparé en vue de faciliter, par une meilleure constitution des écoles, le recrutement, dont le ministre déplore l’insuffisance. La diminution du nombre des candidatures, l’accroissement du nombre des démissions, obligent le maréchal Vaillant à reconnaître « qu’il y a

  1. Études sur le service de santé militaire en France, par L.-J. Bégin, Paris 1860.