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Pour tenir bon, ce qu’il lui faut ;
Et que son dernier rempart tombe,
Que son dernier soldat succombe,
Il lui reste un allié là-haut !

C’est l’Idéal ! sur les armées
Il plane, et, levant son flambeau,
Crie, au-dessus de leurs fumées :
Je suis le vrai, je suis le beau !
J’inscris les victoires d’avance,
J’ai la divine survivance
De tous les soldats généreux
Qui, sûrs de moi dans la mort même,
M’adressent leur appel suprême,
Sachant que je vaincrai pour eux !

Le vœu de ta barbare envie,
O roi, sera mal satisfait ;
Frappe, la France te défie
D’abolir le bien qu’elle a fait :
Elle a gravé les lois humaines
Jusqu’au cœur de ceux que tu mènes ;
Quand tu ferais d’elle un tombeau
Où disparût toute sa race,
Tu n’oserais marquer sa place
Avec le mât de son drapeau !

Conquérant dont la force rampe,
Pour qui tous les droits sont des noms,
Tu craindrais qu’un jour cette hampe
N’importunât tes gros canons ;
Tu craindrais que, prenant racine
Au sol qui fut son origine,
Et se redressant peuplier,
Ce bois ne rappelât au monde
La liberté, droite et féconde,
Que tu veux lui faire oublier.

Mais nous la tenons ferme encore
La hampe du drapeau meurtri,
Et de sa flamme tricolore
L’azur du moins n’a pas péri :
L’espoir nous reste, à nous qui sommes
Le scandale des autres hommes