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ETUDES
D'ECONOMIE RURALE

LA LAINE ET LA VIANDE.

L’élevage des moutons est dans notre pays une industrie relativement récente. Nous ne connaissions guère au milieu du siècle dernier que les vieilles races françaises, classées par les naturalistes immédiatement au-dessus du type sauvage ; encore étaient-elles fort médiocrement soignées, et la reproduction en était abandonnée à peu près au hasard. En 1786, date de l’introduction des moutons mérinos en France et de la création de la bergerie royale de Rambouillet, commença un progrès qui naturellement fut assez lent, à se répandre. Les mérinos, comme on sait, venaient d’Espagne ; dès le temps des Romains, s’il faut en croire la légende, on les considérait comme une des richesses nationales de la péninsule. La possession des troupeaux y fut longtemps un privilège, et l’on parle encore d’une puissante compagnie, la Mesta, qui jouissait autrefois du droit exclusif de parcours sur une vaste étendue de territoire. Enfin l’antique renom de la race mérine espagnole fut porté bien loin au-delà des Pyrénées. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les gouvernemens de divers états de l’Europe dépensèrent beaucoup d’argent et de peine pour acclimater les précieux animaux. La Saxe, la première, y réussit admirablement. Grâce à des soins infinis, à des croisemens intelligens, elle lutta bientôt avec l’Espagne pour la production des laines, et parvint ensuite à la dépasser. Partout on admira la toison des moutons de race