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nom de Samoa-na-tazi (union samoane). Cette assemblée décréta une nouvelle constitution fédérale, véritable progrès, puisqu’elle fondait l’unité de l’archipel, en ce sens que les lois votées à Satui-samau en assemblée générale devenaient obligatoires dans tous les districts. Laupapa renonçait à son titre, mais conservait son autorité sur la ville de Matagofié, érigée en district. Si l’adhésion de ce chef aux décrets de l’assemblée eût été sincère, les troubles qu’avaient suscités ses menées ambitieuses eussent été ainsi conjurés. Les chefs de cette assemblée, confians en sa parole, rentrèrent en effet dans leurs districts, laissant à peine quelques forces au vieux Maliétoa. Malheureusement Laupapa n’avait vu dans toutes ces négociations qu’un moyen d’attendre une occasion plus favorable, et quand cette occasion se présenta par la dispersion de ses adversaires, il leva le masque et commença la guerre. Les événemens ont ici une gravité sérieuse à cause de la part considérable qu’y prend le consul anglais ; il nous semble dès lors nécessaire de recourir à des documens officiels pour les exposer. Le vieux Maliétoa s’empressa d’écrire au gouvernement de la reine Victoria la curieuse lettre qu’on va lire.


A SON EXCELLENCE LE MINISTRE DE LA MARINE DU GOUVERNEMENT ANGLAIS.

Malinuu, 26 mars 1869.

« Depuis la lettre que j’ai écrite à votre excellence en janvier dernier, Williams, votre consul, a encore fait à Samoa bien des choses contraires à la justice, semblables à celles que je vous ai déjà citées.

« La guerre a éclaté entre mon neveu (le fils de mon frère) et moi. A notre approche, les adhérens à son parti ont fait semblant de se soumettre et nous ont promis d’établir une fédération sous le titre d’Union samoane. Après avoir donné connaissance par lettres de ce nouveau gouvernement aux blancs et aux consuls, nous nous sommes mis en devoir de faire des lois en rapport avec notre nouvelle constitution.

« Mais bientôt après les adhérens au parti de mon neveu se sont précipités sur nous à l’improviste, nous ont chassés et ont brûlé nos maisons, c’est pourquoi nous avons de nouveau fait nos préparatifs de guerre ; nous avons de nouveau écrit à MM. les consuls européens à peu près en ces termes :

« Messieurs, restez tranquilles, vous autres, mais nous vous prévenons, que la guerre entre nous Samoans va certainement avoir lieu, parce que nous sommes obligés de venger la violation du traité qui avait été fait entre nous, traité que le jeune Laupapa et les siens ont violé. Nous désirons tous que la guerre n’ait lieu qu’à Malinuu et