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pris fin, jusqu’à ce qu’elle soit sortie du sommeil qui suit inévitablement de tels accès.

C’est aussi à la Salpêtrière, dans les vastes terrains qu’on nomme le marais, que l’administration a établi le jardin central qui fournit des fleurs aux parterres et aux-préaux de tous les hôpitaux de Paris. Cela peut paraître excessif au premier abord, mais cette attention pour les malades est très judicieuse, très humaine, car rien ne leur fait plus de plaisir que la vue de la verdure et des plantes en floraison. Dans un coin du marais, on a installé au mois d’avril dernier, sous la direction d’un praticien habile, une génisserie, étable destinée à recevoir un certain nombre de génisses, sur lesquelles on produit le cow-pox dont on se sert pour les vaccinations et les revaccinations. Les résultats obtenus ont été excellens, et ils engageront sans doute l’administration à conserver, à augmenter, à faire fructifier cette précieuse fabrique de vaccin, qui, dans les cas d’épidémie, peut devenir une ressource inappréciable pour la population parisienne.

A la Salpêtrière et à Bicêtre, on peut se rendre compte facilement du système de retraite que l’assistance publique met en œuvre pour ses vieux employés. Après trente ans de service et soixante ans d’âge, elle leur accorde, suivant l’importance des fonctions qu’ils ont exercées, une pension qui varie pour les hommes entre 400 et 250 francs, pour les femmes entre 350 et 200 francs. Une telle somme est fort minime et à peu près insuffisante pour répondre aux besoins de la vie la plus modeste. Aussi à cette retraite plusieurs anciens employés préfèrent-ils le repos. Pour être admis au titre de reposant ou de reposante, il faut remplir les conditions d’âge et de service exigées pour la pension ; selon qu’on a fait partie des employés de première, de seconde ou de troisième classe, on obtient dans un des hospices de la vieillesse une chambre et un cabinet, une chambre isolée, un lit dans un dortoir commun. On reçoit la nourriture, les vêtemens, une certaine quantité de bois et de chandelles, et les soins gratuits lorsque l’on est malade. En outre il est accordé à chaque reposant, suivant la catégorie à laquelle il appartient, un secours annuel de 72 francs pour la première classe, de 50 francs pour la seconde, de 30 francs pour la troisième ; cette indemnité s’augmente de 3 francs par année de service dépassant le chiffre réglementaire de trente ans. A la Salpêtrière ainsi qu’à Bicêtre, un bâtiment est réservé aux personnes en repos, qui vivent entre elles comme les petits bourgeois d’une bourgade de province. Les hommes qui savent quelque métier en tirent parti pour accroître leur bien-être, les femmes tricotent et parfois se réunissent le soir pour faire une partie de nain jaune ou de biribi.