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construit est, après cinq années de service, tellement imprégné de miasmes délétères, qu’il faut le démolir et en bâtir un autre. Chacun des hôpitaux se formait d’un nombre plus ou moins grand de baraques peu étendues. Le plus considérable de tous, établi à Chesnut-hill, près de Philadelphie, se composait de 50 baraques, réduites chacune à un rez-de-chaussée et dispersées suivant les rayons d’une sorte de cercle ; elles débouchaient toutes dans une galerie fermée et couverte servant à la fois de moyen de communication et de promenade pour les malades. Le cercle est encadré dans un carré où se trouve un chemin de fer. Les bâtimens de l’administration, les réservoirs d’eau, la bibliothèque, occupent le centre commun au carré et au cercle. Cet hôpital a pu recevoir jusqu’à 3,000 blessés ou malades. Le nombre est grand, mais par le fait de la division en bâtimens peu vastes et complètement séparés, et grâce à un ensemble de précautions hygiéniques bien conçues et sévèrement maintenues, cette agglomération n’a donné lieu à aucun accident. On n’a connu dans cet établissement ni la pourriture d’hôpital, ni le typhus, ni le scorbut. La construction même de cet hôpital fut un tour de force : il fut érigé tout entier en soixante-dix jours par un entrepreneur.

Les résultats généraux du système sanitaire qui a prévalu en Amérique sont dignes d’être cités, et méritent qu’on se les propose pour modèles. Pendant les huit ans qui avaient précédé la guerre, la mortalité dans l’armée régulière des États-Unis avait été en moyenne de 24 sur 1,000. En 1859, année de paix pour l’Angleterre, l’armée anglaise n’avait perdu que 9 hommes sur 1,000. Dans l’armée française en 1846, la mortalité était, pour l’intérieur de la France, de 19 sur 1,000, pour l’Algérie de 64 sur 1,0.00. Ce dernier chiffre est beaucoup plus élevé que celui de l’armée des États-Unis, qui cependant était dans des conditions de service analogues à celles de notre armée d’Afrique ; mais plus tard la France avait repris l’avantage sur les Américains. C’est ainsi qu’en 1862 et en 1863 l’armée française à l’intérieur avait perdu 10, et en Algérie 12 sur 1,000. Aux États-Unis, dès le début de la guerre, la situation changea : la première année, la mortalité fut sur 1,000 bommes de 67, dont 17 pour blessures et 50 par maladies. Pendant la guerre de Crimée, dans l’armée française la mortalité par année moyenne a été du fait de la guerre de 34, du fait des maladies de 121, en tout de 155. Dans l’armée anglaise de Crimée, les proportions correspondantes ont été, pour les blessures, de 33, pour les maladies, de 93, en tout de 126.

La première année une fois passée, l’état sanitaire de l’armée du nord s’améliore promptement. Dans la seconde année, le total de