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les tissus et les organes, montrer les propriétés élémentaires et irréductibles s’enchaîner, s’emmêler, s’engrener, pour provoquer par leur ressort l’accomplissement des opérations les plus élevées, montrer la connexion de tous les actes dans le développement embryonnaire comme dans la vie plénière, et entrevoir le mécanisme des perturbations de toute sorte, c’est donner une ample satisfaction pour le présent et de belles espérances pour l’avenir en ce qui concerne la connaissance de l’économie animale.


V

Il convient peut-être, après cette esquisse de l’état actuel de l’anatomie générale, de jeter un coup d’œil sur l’influence que M. Robin a exercée comme chef d’école, et sur l’impulsion qu’il a donnée aux recherches microscopiques en France. En effet, c’est lui qui, par son enseignement et son exemple, a introduit dans les générations actuelles le goût de ces recherches si instructives et si fécondes. Dès 1848, il fonda un laboratoire où pendant quinze ans plusieurs centaines de disciples français et étrangers se sont exercés, sous sa direction, au maniement des instrumens grossissans et à toutes les opérations délicates que nécessitent les études d’anatomie générale. Des hommes comme Bigelow, Laboulbène, Béraud, Hiffelsheim, Luys, Lorain, George Pouchet, lui font le plus grand honneur. Pour donner plus d’extension à son enseignement, il en publia la substance dans un volume (Traité du microscope et des injections) qui est devenu, avec celui de Dujardin, le manuel des observateurs. D’autre part, poussant, conseillant les plus distingués de ses élèves, il leur inspira des recherches dont les résultats, consignés dans des thèses et dans des mémoires remarqués, démontrèrent victorieusement la puissance de la méthode employée. Il n’y a rien de plus beau dans l’histoire des sciences contemporaines que ce mouvement décisif qui, grâce à M. Robin, porta un grand nombre des jeunes médecins d’alors au sein de ces investigations révélatrices des mystères les plus cachés de la vie.

A la même époque, les laboratoires de Paris of fraient le spectacle de la plus heureuse activité. M. Claude Bernard, à l’aurore de sa réputation, commençait au Collège de France, — dans le petit cabinet où travaillait Magendie, — ses mémorables expériences sur la production du sucre animal. Il étonnait déjà les écoles de physiologie de l’Europe par sa précision méthodique et sa pénétration clairvoyante. M. Coste, dont la persévérance n’a d’égale que l’ardeur méridionale, chercheur hardi, égaré quelquefois par l’enthousiasme, mais toujours ramené par un vif sentiment de la réalité,