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l’embryon s’y forme. Ce dernier naît dans la tache embryonnaire de la même façon que le noyau vitellin dans le vitellus. Chaque élément, par le fait même de son existence et de l’accomplissement du rôle qui lui est propre, devient ici la condition d’existence d’autres élémens apparaissant nécessairement dans le milieu qu’il a engendré et se comportant comme lui.

Dès lors à quel moment et pourquoi un principe vital interviendrait-il dans cette suite de générations ? Dès que le vitellus se borne à offrir successivement les conditions nécessaires à la genèse des divers élémens de l’embryon, et que celles-ci sont solidaires, il est clair que, si on entrave ou modifie un des actes du développement, celui-ci ne se continuera plus d’une manière normale. C’est ce que l’expérience vérifie pleinement. Les causes les plus légères, les moindres déviations spontanées ou provoquées dans l’arrangement des cellules blastodermiques ou embryonnaires, compromettent la formation régulière du nouvel individu en amenant soit la production de monstruosités, soit la mort du germe. Quand celui-ci est arrêté dans son évolution, ses enveloppes naturelles continuent la leur, et l’on voit se former ce qu’on appelle une môle. En effet, il faut concevoir que les cellules dont nous venons de parler n’ont absolument qu’une fonction et qu’un pouvoir : fournir les conditions nécessaires à la formation des premiers organes de l’embryon, c’est-à-dire des lames dorsale et ventrale. Ces lames sont à leur tour le point de départ de la corde dorsale, qui détermine l’apparition des deux moitiés de l’axe nerveux central. Viennent ensuite les cartilages vertébraux, les yeux et les vésicules auditives, le cœur, les vaisseaux, le sang, etc. Chacun de ces organes devient, en apparaissant, la cause de la génération de l’autre, en sorte que, si quelque circonstance dérange ou fait cesser la production ou le développement du premier, le second ne se montre pas ou bien donne une monstruosité. Chez les truites, les saumons et les brochets, il meurt de 70 à 80 pour 100 des œufs fécondés artificiellement. Lereboullet, à qui l’on doit cette observation, a fait voir également que sur 100 œufs qui éclosent, le nombre des monstres produits varie de 2 à 5. L’homme est soumis aux mêmes contingences. — Sur 3,000 naissances, il y a toujours au moins 200 mort-nés à Paris et la moitié dans le reste de la France, et sur 100 mort-nés on compte en moyenne un monstre non viable. Indépendamment des mort-nés, on constate dans l’espèce humaine un nombre considérable d’anomalies congénitales qui, sans menacer l’existence, l’abrègent et l’embarrassent souvent en s’opposant : à l’exercice régulier des fonctions. Le crétinisme, l’idiotie, la surdimutité, l’hydrocéphalie, la spina-bifida, l’extrophie de la vessie, les imperforations ou l’absence du dernier intestin, les anomalies