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des déluges, basée sur le déplacement lent et périodique du grand axe de l’orbite terrestre par suite du phénomène de la précession des équinoxes, d’où résulte une différence dans la longueur respective des saisons. Le cycle entier de ce déplacement mesure une période d’environ 21,000 ans. Actuellement le printemps et l’été réunis de notre hémisphère dépassent de sept jours la durée de l’automne et de l’hiver. C’est en 1248 que les saisons chaudes ont atteint leur plus grande longueur dans notre hémisphère ; elles tendent depuis à diminuer, et cette diminution continuera jusqu’à l’année 6498, où l’égalité sera rétablie entre les saisons extrêmes ; mais après ce terme, le mouvement continuant d’agir, l’hiver et l’automne empiéteront de plus en plus sur l’été et le printemps jusqu’en l’an 11784 de notre ère, après quoi une oscillation en sens inverse ramènera peu à peu les saisons vers les proportions actuelles, Il faut ajouter encore que les saisons chaudes de notre hémisphère correspondent aux saisons froides de l’hémisphère austral, et que c’est maintenant ce dernier qui supporte les hivers les plus longs. En partant de cette donnée astronomique, M. J. Adhémar, auteur des Révolutions de la mer, et M. H. Lehon après lui ont cru que les glaces en s’accumulant vers l’un des pôles pouvaient changer l’équilibre et déplacer le centre de gravité du globe.

Les tenues de l’hémisphère austral seraient maintenant noyées, et les sommités recouvertes de glaces, tandis que celles de l’hémisphère boréal se trouveraient presque à sec, et que les glaces n’auraient cessé de diminuer autour du pôle nord jusque vers le milieu du XIIIe siècle. Le mouvement déjà commencerait à se ralentir, et un moment viendrait où notre hémisphère, envahi de nouveau, disparaîtrait en partie sous les eaux. On conçoit les conséquences géologiques d’une pareille théorie, si elle était admise. La période glaciaire aurait correspondu au temps où les hivers de notre hémisphère ont été les plus longs, elle aurait produit ses effets les plus intenses vers l’an 9250 avant notre ère ; mais le déplacement du centre de gravité serait temporaire et périodique comme le phénomène dont il dépendrait. Le retour d’étés plus longs, en fondant les glaces de l’un des pôles, amènerait inévitablement une débâcle, à la suite de laquelle les eaux, brusquement rejetées vers l’hémisphère opposé, inaugureraient, pour lui une nouvelle ère glaciaire et balaieraient les êtres sur leur passage. C’est là ce qui serait arrivé jadis en Sibérie lors de l’ensevelissement des mammouths, et ce qui nous arriverait de nouveau lorsque les glaces de l’hémisphère austral fondraient à leur tour, circonstance qui se présenterait dans cinq ou six mille ans d’ici.

Quelque spécieuse qu’elle paraisse, cette théorie ne supporte guère l’examen. Où trouver dans le passé la trace de ces actions