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IV. — NEW-YORK.

Il y a deux cent cinquante ans, à la place de New-York, on voyait une île, des collines, un marais. Des peuplades indiennes, les Lenni-Lenape et les Manhattans, allumaient leurs feux et construisaient leurs buttes sur ces rivages. Un Anglais au service de la Hollande, qui cherchait un passage par les mers polaires vers la Chine, Henry Hudson, vit en 1609 ces Indiens, et il leur donna des souliers, qu’ils pendirent à leur cou en guise d’ornemens. Sur l’emplacement actuel de Broadway, quelques Hollandais s’établirent avec Christiansen, en 1614, pour faire le trafic des fourrures, et ils construisirent quatre maisons en bois et un petit navire, le Restkess (sans repos), nom qui convenait si bien aux destinées futures de ce coin du monde. Un fort, une église, trois moulins à vent, cent vingt maisons et 1,000 habitans, qui font paître leurs vaches dans les prairies maintenant occupées par des palais, voilà quelle était la nouvelle Amsterdam en 1654„ sous le gouverneur Stuyvesant, lorsque le Nicholls, envoyé par le duc d’York, auquel Charles II avait cédé ce territoire, s’en empare avec 400 hommes, appelle le fort Fort-James, la ville New-York, et substitue à la petite municipalité élue un maire, quatre aldermen et un shérif, nommés par le gouverneur. Plus d’un Anglais se crut lésé lorsque la paix de Breda, en 1667, donna aux Hollandais Surinam en échange de New-York.

Reprise par les Hollandais, puis rendue aux Anglais, New-York était à la fin du XVIIIe siècle une petite ville avec des maisons en brique, sans étage, le pignon sur la rue, où l’on parlait dix-huit langages et où l’on professait huit cultes. Il n’y avait pas d’autre livre que la Bible. Le gouverneur seul allait en voiture, et les knickerbockers se mêlaient aux Anglais, aux Indiens, aux Canadiens, aux Français, pour fêter saint Nicolas, dont l’image ornait la poupe du premier navire, débarqué, ou pour causer autour du poirier planté par Stuyvesant, et que l’on voyait encore, il y a peu d’années, au coin de la 13e rue et de la 3e avenue. C’est en 1683 que le gouverneur Dungan réunit la première assemblée populaire pour rédiger la première charte des libertés. La ville, divisée en six quartiers, fut autorisée à élire chaque année un alderman et un conseiller municipal, la nomination du maire restant au gouverneur. Cette organisation ne dura pas longtemps, grâce aux violences des gouverneurs, vauriens titrés envoyés par l’Angleterre ; mais une nouvelle charte restitua les mêmes droits en 1730. Dans l’intervalle, New-York, habité par 10,000 habitans, avait vu s’établir pour la première