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Le
régime municipal
des grandes villes


Le problème de l’administration des grandes villes qui servent de résidence aux souverains et de capitales aux nations est un problème tout nouveau. Les siècles passés ne l’ont point connu. Lorsque la reine Élisabeth d’Angleterre, par un édit de 1602, défendait de loger à Londres plus d’une famille par maison, d’élever dans la ville des constructions nouvelles, et même d’achever celles qui étaient commencées, « déclarant qu’une trop grande multitude devient ingouvernable et ne peut plus être contrainte à servir Dieu et à obéir à sa majesté, » Londres n’avait encore que 145,000 habitans. Moins de cent ans après, le roi Louis XIV fut inquiet à son tour des agrandissemens de Paris. Nul n’avait plus contribué que lui à grossir Paris par les splendeurs de la cour, le goût des constructions, la centralisation des services publics, l’exagération des établissemens militaires. Cherchant trop tard à ralentir le courant dont il avait lui-même accéléré la marche, il fit poser des bornes autour de Paris en 1672. Un édit prohiba la construction de nouvelles maisons au-delà de ces bornes, « étant très difficile, dit le préambule, que l’ordre et la police se distribuent commodément dans toutes les parties d’un si grand corps. » Les arrêts du parlement avaient précédé les édits du roi. On croirait écrites d’hier ces doléances d’un arrêt de 1638 contre les dangers d’une agglomération qui « rend la ville malsaine, les vivres et les logemens trop chers, la police impossible, les campagnes désertes. » Cependant le Paris de Louis XIV ne contenait pas plus de 500,000 habitans. Il n’était pas même question à cette époque d’une petite ville de