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solus du système de la participation. Certes on ne peut nous accuser d’en méconnaître l’importance ou de chercher à les atténuer; mais il faut se garder de généralisations précipitées. Parce qu’une organisation du travail s’est montrée efficace dans une houillère, on ne peut conclure qu’elle doive l’être de même pour une autre industrie.

Si l’on examine de près ce dernier type du système de la participation aux bénéfices, on voit qu’il se rapproche beaucoup des deux précédens. La main-d’œuvre a une influence prépondérante dans la bonne exploitation d’une houillère, le capital ne joue dans une pareille entreprise qu’un rôle subordonné. Environ 70 pour 100 du prix total de l’extraction sont représentés par les salaires payés pour le travail manuel accompli sous terre; 12 ou 15 pour 100 sont formés par le prix de matières dont le gaspillage ou l’emploi abusif peut être prévenu par le bon vouloir et la vigilance de l’ouvrier : c’est de lui qu’il dépend de détacher le charbon en morceaux aussi gros que possible, de réduire la proportion ordinaire du menu, d’opérer avec soin le triage, d’épargner le bois, l’huile, les rails, de maintenir les galeries toujours en parfait état. Le travail à la tâche, les primes à la production et à l’économie des matières premières, sont des élémens insuffisans dans une industrie qui ne comporte pas le degré d’exactitude et de régularité que l’on rencontre dans les filatures, les tissages mécaniques ou les usines métallurgiques. Combien la surveillance doit être imparfaite au fond de ces puits, il n’est pas nécessaire de le prouver. L’indolence ou le mauvais vouloir peuvent impunément porter au patron un détriment considérable. Pour s’épargner quelques minutes de plus de travail ou de soin, l’ouvrier peut anéantir une valeur de plusieurs livres sterling. Ainsi l’administration intérieure d’une houillère est une œuvre difficile, les moyens de contrôle et d’encouragement y sont presque toujours impuissans. D’un autre côté, la capacité commerciale des directeurs n’a qu’une faible place dans les résultats de l’entreprise, il n’y a pas beaucoup à combiner ou à prévoir ; l’industrie extractive est par sa nature même rudimentaire, les succès y dépendent surtout de la situation des lieux, de l’abondance des gisemens et de la qualité du personnel ouvrier.

On vient de passer en revue les établissemens où la participation aux bénéfices a réussi; tous nous ont présenté des traits communs qui les distinguent nettement de la généralité des industries. La main-d’œuvre y a une importance prépondérante, soit parce que le capital y est relativement minime, soit parce que le bon entretien de ce capital y dépend complètement du bon vouloir de l’ouvrier; la surveillance y est impossible ou malaisée, parce que les ouvriers sont disséminés ; le régime du travail à la tâche, des primes à la