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veau. Eux aussi ont été soumis à l’action du climat, ils se sont amollis, et le montagnard osque est devenu l’habitant dépravé de la bienheureuse Campanie ; mais, enfans du sol, en relations constantes avec les Apennins, leur berceau, ils étaient régénérés sans cesse ; les robustes paysans, que l’appât des salaires attirait, descendaient dans les villes du littoral, et y faisaient souche de citadins. On cite trop volontiers les conquérans qui ont occupé Naples et y ont dû laisser des traces de leur passage ; on cherche avec trop de complaisance le profil grec, le caractère romain, la ressemblance des Arabes, des Angevins ou des Espagnols. Il est possible de satisfaire quelquefois cette passion archéologique : on trouvera des analogies de types dans les familles aristocratiques surtout, parce que les conquérans se mêlaient plus naturellement à l’aristocratie par des alliances, constituant eux-mêmes un nouvel élément d’aristocratie ; mais, à ces exceptions près, tout a été éliminé ou absorbé par l’énergie du sang national. Le peuple proprement dit est bien resté campanien, il est l’héritier direct des Osques établis sur le golfe de Naples ; il a conservé en partie les qualités et les défauts de l’ancienne population, affaiblie par une longue suite de siècles, gâtée par la paresse et le vice, rendue plus lymphatique par le régime et l’air des villes.

Le type physique est très particulier : il est unique en Italie, il ne ressemble ni au type romain, ni au type toscan ; ce n’est ni celui des Siciliens, ni celui de la vieille race gauloise, qui occupe encore la Cisalpine, c’est-à-dire le nord de l’Italie. Les Napolitains ont les yeux d’un noir métallique, les cheveux d’une teinte presque brûlée ; ces cheveux ne sont pas admirablement plantés sur le front comme ceux des Grecs, ou épais sur la nuque comme ceux des Romains ; ils ont quelque chose de capricieux et d’irrégulier ; le teint est mat, plutôt brun que bronzé. Le nez est caractéristique ; il est presque toujours prononcé, mais sans style ; gros à l’extrémité, il paraît un peu enflé. La voix, qui chez les hommes prend avec aisance les tons les plus divers, et dans les querelles les sons les plus aigus, est restée plutôt gutturale chez les femmes ; les jeunes filles elles-mêmes ont dans certaines notes un organe rauque et voilé qui ressemble à de l’enrouement.

La taille est moyenne, rarement élégante comme dans le nord : il n’y faut chercher ni la force, ni la grandeur, ni la noblesse d’attitudes. Les montagnards sont plus trapus, plus robustes, parce qu’ils sont laborieux, chasseurs, habiles à planter la vigne au pied des ormes ou à construire des murs de pierre sèche pour retenir sur les pentes escarpées la terre où poussera l’olivier. Les habitans de la plaine au contraire sont plus languissans ; ils aiment l’indolence