Page:Revue des Deux Mondes - 1870 - tome 85.djvu/688

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L’INSTINCT
CHEZ LES INSECTES

I. Pierre Huber : Mœurs des Fournis indigènes, Paris 1868. — II. Blanchard : Métamorphoses, mœurs et instincts des insectes, Paris 1868. — III. Darwin : De l’Origine des espèces, traduction française par Mlle C. Royer, Paris 1869.

Qu’est-ce que l’instinct? En quoi diffère-t-il de l’intelligence? Quelle explication en peut-on donner dans l’état actuel des sciences de la vie? Autant de questions que le temps présent, pour la première fois, pose nettement. Ce n’est pas d’aujourd’hui que les rapports ou les différences de l’instinct et de l’intelligence occupent les philosophes et les moralistes, impuissans à résoudre des problèmes qui touchent essentiellement à la biologie. Sans remonter plus haut, on sait l’étrange conception des animaux-machines de Descartes, suivi en cela par Bossuet, par tout le XVIIe siècle; mais maintenant les biologistes, à leur tour, abordent le problème : l’anatomie et la physiologie vont peut-être nous donner la solution vainement demandée depuis Aristote et saint Thomas aux systèmes philosophiques et religieux.

George Cuvier le premier distingue bien l’instinct de l’intelligence dans la seconde édition du Règne animal (1829), où il résume les travaux qu’avait publiés son frère Frédéric depuis plusieurs années. Celui-ci, placé à la tête de la ménagerie du Muséum, avait cru qu’il était du devoir de sa charge de faire sur les animaux confiés à sa direction une série d’études suivies : il pensait comme Geoffroy Saint-Hilaire que ces sortes d’établissemens n’ont pas d’autre objet. « Il existe, nous dit Cuvier, chez les animaux une faculté diffé-