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CHRYSOSTOME ET EUDOXIE.


cœur ; il se plaît à lui montrer ce qu’elle est, ce qu’elle a été depuis son enfance, et combien en se considérant dans ses mérites elle doit se trouver supérieure aux misérables adversités qui l’abattent. Dans son désir d’être écouté, il ne recule pas devant une sainte et digne flatterie, cette flatterie qui consiste à exagérer la force de ceux qui ont à livrer un grand combat pour les mettre en quelque sorte de niveau avec les difficultés qui les attendent. Le tableau qu’il trace à ce sujet nous intéresse principalement parce qu’il nous fait voir Olympias telle que son ami la voyait lui-même : pour lui en effet, c’était à peine une femme, c’était déjà un être angélique, et cet être se laissait dominer par des calamités apparentes, méprisables aux yeux du sage !

il entre dans l’énumération des vertus dont elle offre l’ensemble merveilleux. Il vante la pureté de sa vie, qui, passée dans le plus chaste veuvage, égale en mérite celle des vierges consacrées à Dieu ; la charité vient ensuite, l’aumône supérieure à la virginité même, et dont Olympias tient le sceptre entre toutes ; — la patience, les épreuves l’ont en quelque sorte multipliée chez elle sans que rien la pût lasser. Un discours entier, une histoire même ne suffirait pas à raconter toutes les peines qui l’ont assaillie depuis sa jeunesse : persécutions de ses proches, persécutions des étrangers, grands et petits, de ses amis, de ses ennemis, sans oublier les prêtres ; chaque épisode de ces douloureuses aventures fournirait à sa glorification un sujet inépuisable. Que dire aussi de ses privations volontaires, des mortifications, des jeûnes, de la lutte de l’âme contre la chair ?

« Les mots de sobriété, de frugalité dans les repas ne vous sont point applicables, ma pieuse et vénérée dame, lui dit-il ; il faut en chercher d’autres, il faut élever son langage pour rendre la perfection idéale de votre vie. L’austérité de vos veilles sacrées, quelle expression la rendra ? Vous avez dompté le sommeil pour la prière, comme vous avez dompté la faim pour l’abstinence, et il vous est devenu naturel de veiller comme aux autres de dormir ; votre bienfaisance et votre charité, plus ardentes que les plus ardentes fournaises, ont porté votre renommée jusqu’au-delà des mers. Retracer votre histoire serait ouvrir et déployer aux yeux tout un océan de merveilles : je l’eusse essayé peut-être, si je n’avais ici un but plus utile encore et plus respectable, vous assister et vous guérir. »

Je laisserai de côté les développemens qu’il consacre aux principales vertus d’Olympias pour me borner à un passage éminemment curieux, parce qu’il a trait au luxe des femmes dans la capitale de l’Orient, luxe insensé qui laissait bien en arrière les extravagances de Rome et de tout l’Occident. — Or Olympias s’était toujours distinguée par sa tenue modeste et par son mépris de la parure, vertu