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di livello), ce mode de tenure s’était fort répandu autrefois, le gouvernement l’ayant favorisé pour diminuer l’étendue territoriale des grandes propriétés et des biens ecclésiastiques directement administrés par le clergé. Les livellari, c’est ainsi qu’on appelle ces fermiers à bail emphytéotique, se trouvent dans une situation précaire comme les petits cultivateurs eux-mêmes. C’est que, dans les pays du midi, ces cultures délicates et de revenu variable, la vigne, l’olivier, mettent à bien des épreuves les agriculteurs sans capitaux et sans crédit, qui ont besoin du produit immédiat des récoltes pour soutenir leur vie et celle de leur famille. Bien souvent les récoltes manquent plusieurs années de suite, et les livellari, ainsi que les petits propriétaires, se trouvent réduits aux expédiens, si ce n’est à la plus extrême misère. Il n’en est pas de même dans les montagnes, où le champ n’est pour l’ouvrier qu’un accessoire de l’usine, — où, grâce aux salaires industriels, l’on peut patiemment attendre le retour d’une année favorable. A côté de ces propriétaires indigens, qui font de la culture de la terre leur occupation permanente, l’on trouve sur les collines et dans les vallées de la Toscane une classe plus fortunée : ce sont les petits propriétaires non cultivateurs, artisans des villes pour la plupart, qui emploient toutes leurs économies à s’acheter un petit bien qu’ils font exploiter à mi-fruit, selon le système habituel, par des métayers. Les tailleurs, les serruriers, les petits marchands des villes et surtout de Florence n’entrevoient pas d’autre destination à leurs épargnes que l’achat d’une métairie. Les valeurs mobilières ne leur ont jamais inspiré de confiance, et ce ne sont pas les aventures qu’a traversées le crédit de l’Italie pendant ces dernières années qui peuvent leur donner la foi dont ils ont jusqu’ici manqué. Le système d’amodiation en usage dans la Toscane est depuis bien des siècles le métayage. La mezzeria ou colonia parziaria descend en ligne directe du colonat romain. Sous l’empire, l’Italie, divisée en propriétés énormes, était exploitée par d’immenses hordes d’esclaves que dirigeait un intendant ; mais ce régime, selon le mot de Pline, amena la désolation et la dépopulation de toutes les contrées soumises à Rome : latifundia perdidere Italiam et jam vero provincias. Il n’y eut d’autre remède que de morceler les terres à l’infini en les confiant à des familles d’agriculteurs intéressés à développer la production, dont on leur abandonnait une quote-part. La contenance des exploitations était bornée à la capacité de travail de chaque famille. Il n’y avait dans ce système ni journaliers, ni domestiques de ferme, ni fermiers, il y avait seulement des agriculteurs associés au propriétaire. Cette organisation, qui prit naissance avant l’invasion des barbares, couvrit presque toute l’Europe occidentale ; elle disparut peu à peu des contrées du nord. Elle ne subsiste