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des plus beaux spécimens des nombreuses épîtres adressées par Chrysostome aux confesseurs et martyrs de sa persécution.

Il trouva, dans le nombre des dépêches venues de Constantinople, celles où ses diaconesses lui rendaient compte de leur mise en accusation comme incendiaires ou schismatiques, de ce qu’elles avaient souffert, soit au forum devant le juge, soit dans la prison. Pentadia y énumérait toutes ses douleurs avec un amer plaisir, rappelant peut-être que les juges d’Eudoxie avaient su dépasser en barbarie ceux de son ancien persécuteur Eutrope. Nous avons reproduit en grande partie, dans un des récits précédens, la réponse de Chrysostome à cette infortunée qu’il avait sauvée autrefois, et qui maintenant souffrait pour lui. Ampructé lui racontait également les épreuves auxquelles avaient été soumises elle et ses sœurs, pour leur fidélité envers leur pasteur légitime et envers l’église. Ampructé était une des diaconesses qui avaient assisté dans la basilique de Sainte-Sophie aux derniers adieux de l’archevêque, et qui, à ce titre seul, avait dû être englobée dans l’accusation d’incendie. Cette généreuse fille dirigeait, à ce qu’il paraît, un monastère de nonnes à Constantinople ; elle était étrangère à cette ville et venue probablement de Syrie lorsque Jean avait pris possession de son archevêché, et on croit qu’elle retourna mourir dans sa terre natale. Elle savait mal le grec et s’excuse par cette raison d’écrire rarement à son père bien-aimé. Chrysostome lui répondit à ce sujet que, plutôt que de le priver de ses lettres, Ampructé ferait bien de lui écrire dans son idiome maternel qu’il comprenait tout aussi bien que la langue grecque. Quant à Olympias, elle n’avait rien écrit au sujet de sa confession. La fière diaconesse eût rougi peut-être d’aller entretenir un exilé accablé de maux de ce qu’elle avait été heureuse de souffrir en son nom. Qu’était-ce à ses yeux que son obscure persécution ? que serait-ce que sa mort même à côté des malheurs de ce grand homme dont l’exil ébranlait la chrétienté tout entière ? Voilà ce qu’elle s’était dit, et elle n’avait pas eu le courage de parler d’elle-même ; elle s’était contentée de mentionner en passant, dans ses lettres, qu’elle avait été poursuivie cruellement, comme beaucoup de fidèles, et qu’elle avait récolté sa part de maux pour la cause de l’église et pour la sienne. Ce ne fut que par les lettres des autres ou par les rapports de ses visiteurs venus de Constantinople, que Chrysostome apprit avec quelle noblesse de langage et quelle fermeté d’âme Olympias avait fait reculer ses bourreaux et mis à néant toutes les accusations d’Optatus.

C’est ici qu’il faut placer la série des lettres de Chrysostome à Olympias, lettres toutes personnelles, précieux monumens d’une incomparable amitié, conservés jusqu’à nous par la piété des sou-