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articles de sa constitution ces mots : « aussi longtemps que la principauté sera régie comme état indépendant par la maison régnante. » Plus explicite encore est la convention qu’ont passée ensemble le duc de Saxe-Meiningen et ses états conformément à une décision de la cour d’appel de Dresde, « Si le gouvernement de ce pays, y est-il dit, tombe aux mains d’un héritier qui ne soit pas un ayant-droit à la succession de la fortune domaniale, la famille ducale recevra vingt fois le montant de sa liste civile en propriété privée, dont les deux tiers en biens-fonds, l’autre tiers en espèces, le reste sera bien d’état. » C’est ainsi que dans une partie de l’Allemagne du nord on entend comme un bruit sourd de départ et de déménagement, ce bruit qui ne ressemble à rien, des allées et des venues, des consultations sur ce qu’on emportera, sur ce qu’on laissera, des buffets qu’on vide, des malles qu’on remplit, et tout à l’heure le piétinement et les grelots des chevaux.

Parmi les vingt-deux états dont se compose la confédération du nord, il en est un où le déménagement est chose faite, consommée. Curieuse histoire, grand exemple de sage philosophie donné par un prince qui a préféré devancer les temps, parce qu’il estime que la peur du mal est pire que le mal.

La principauté de Waldeck, à laquelle est adjoint le comté de Pyrmont, est une des plus charmantes contrées de l’Allemagne du nord. Enclavée dans la Westphalie et dans la Hesse-Électorale, arrosée par l’Éder et la Diemel, affluens de la Fulda et du Weser, elle offre un agréable mélangé de montagnes et de plaines, de prairies et de forêts. Elle a 20 milles carrés et 60,000 âmes, en général des âmes honnêtes et laborieuses, presque toutes évangéliques et plus riches que bien d’autres en connaissances primaires, les écoles de Waldeck tenant leur rang parmi les meilleures de l’Allemagne. Ce petit pays a ses richesses ; sans parler de son bétail, il produit du cuivre, du fer, du plomb, et même de l’or ; il a produit aussi de célèbres capitaines et un illustre diplomate, qui fut longtemps le conseiller, le bras droit du grand-électeur[1]. Waldeck, divisé en trois districts, avait une voix dans les séances plénières de la diète de Francfort. La maison qui le gouverne fait remonter, dit-on, ses origines jusqu’à Witikind, l’illustre vaincu de Detmold. Le prince George-Victor succédait à son père en 1845 ; il gouverna d’abord sous la tutelle de sa mère, la princesse Emma. En 1853, il épousa une princesse de Nassau. En 1866, il fit un autre mariage, un

  1. L’histoire du comte de Waldeck vient d’être racontée dans un livre savant et curieux qui fait bien connaître les origines de la grandeur prussienne : Graf Georg Friedrich von Waldeck, ein presussischer Staatsmann im 17 ten. Jahrhundert, von B. Erdmannsdörffer. Berlin, 1869.