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de la lutte engagée par la compagnie des Indes contre les souverains birmans. Cette longue guerre, dont je vais brièvement rappeler les origines, donna le Tennasserim, le Pégou et le pays d’Arakan à l’Angleterre, enleva par conséquent aux Birmans la possession du cours inférieur de l’Irawady en même temps qu’elle leur ôtait tout accès au golfe du Bengale comme à la mer des Indes.

Des voisins aussi turbulens et aussi ambitieux que les Birmans ne pouvaient tarder à fournir aux Anglais un de ces griefs qui servent trop souvent de prétexte à une rupture, et permettent de punir par l’annexion d’un territoire la plus insignifiante violation du droit international. Ils allèrent plus loin et rendirent inévitable, par une suite de provocations réfléchies, une guerre dont on peut dire qu’ils ont pris l’initiative. Plein de confiance dans ses forces, et, comme tous les Orientaux, de dédain pour les étrangers qui avaient donné lieu de suspecter leur bonne foi lors de la guerre que fit aux Pégouans le grand Alom-prah, le fils de ce dernier supportait impatiemment l’extension de l’empire britannique dans les Indes. Jusque vers la fin du XVIIIe siècle, l’ennemi toujours battu et toujours détesté contre lequel les Birmans avaient exercé surtout leur humeur belliqueuse et conquérante avait été le roi de Siam, dont les domaines s’étendaient dans la presqu’île de Malacca ; mais après la cession de Tennasserim Minder-aghee-prah tourna ses regards vers l’ouest et s’efforça, en s’unissant aux Mahrattes, de ruiner l’édifice élevé sur ses frontières par ces Européens que son père victorieux avait traités avec tant d’insolence et de cruauté. Lord Hastings, alors gouverneur-général des Indes, ferma les yeux sur cette complicité dont les preuves lui tombèrent entre les mains, et l’empereur des Birmans, enhardi par un acte de prudence qu’il prit pour de la faiblesse, voulut asseoir par la force sur le trône de Katchar, principauté limitrophe de l’Assam, un prétendant hostile à l’Angleterre. Cette audacieuse intervention eut lieu au commencement de 1824, et avant la fin de la même année elle était punie par l’occupation de Tavoy, de Mergui, de Martaban et de Rangoon. La perte de tous ses ports n’était pas compensée pour le gouvernement birman par la défaite qu’infligea aux Anglais à Tchittagong le général en chef Bandoola, rappelé bientôt de la frontière pour défendre la capitale même de son pays et tué par un obus. Les troupes birmanes, battues en outre à Silhet, chassées de l’Assam et de l’Arakan, durent, malgré leur courage, demander, à la fin de l’année 1825, une suspension d’armes à sir Archibald Campbell, parvenu assez près de Patunagah en remontant l’Irawady. La convention, signée en janvier 1826 par les plénipotentiaires des deux pays, ne fut pas ratifiée par l’empereur des Birmans, à la fierté duquel les vainqueurs voulaient