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traditions nationales se réveillèrent, des sociétés commerciales naquirent de toutes parts, ce fut une ardeur et une fièvre de jeunesse qui se manifestèrent par des entreprises multipliées, et cependant tout était alors à refaire : la législation, qui variait dans les anciens états, avait besoin d’être refondue et rendue plus uniforme. Les ministres et le parlement procédèrent à cette œuvre avec un esprit de défiance qui les portait vers la réglementation la plus outrée ; leur œuvre trahissait des préventions puisées dans le passé, en même temps que des préoccupations excessives de l’état du pays. De cette disposition d’esprit découle une série de mesures restrictives, accomplies généralement par décret, et qui toutes se montrèrent aussi inefficaces pour le bien qu’effectives pour le mal. Non-seulement le code de commerce italien, publié en 1865, reproduisait dans l’article-156 la disposition du code français qui exige pour la fondation d’une société anonyme l’autorisation du souverain et l’homologation des statuts par le gouvernement, mais cette clause, si rigoureuse qu’elle fût, n’était en Italie que le point de départ et comme le premier anneau d’une longue et lourde chaîne d’entraves administratives. On ne recula pas devant l’institution d’un office permanent, composé de fonctionnaires chargés d’exercer sur les sociétés anonymes une surveillance attentive. Après plusieurs essais, on constitua une administration spéciale, dépendant du ministère du commerce et connue sous le nom de sindacato governativo. Ce sindacato avait à sa tête un fonctionnaire supérieur appelé censeur central (censore centrale), et comprenait en outre, aux termes du décret du 27 mai 1866, 1 inspecteur-général, 11 inspecteurs de divers grades, avec un certain nombre d’employés. Tout le royaume était divisé en districts spéciaux dont chacun était confié à un inspecteur, chargé de la surveillance de toutes les sociétés anonymes comprises dans son ressort. Les droits et les devoirs du sindacato et de ses délégués étaient singulièrement étendus. Ils avaient pour mission de veiller, dans l’intérêt des actionnaires, des assurés et des tiers, à l’exécution et à l’observation des prescriptions législatives, et en particulier du statut social. Ils pouvaient ordonner la présentation des livres et comptes de chaque société et même la publication ; ils pouvaient procéder à des vérifications de caisse, assister à toutes les assemblées générales et suspendre l’exécution de toute délibération qui leur paraîtrait entachée d’irrégularité ; ils avaient le droit de convoquer motu proprio le conseil d’administration toutes les fois qu’ils avaient des raisons sérieuses de douter de la loyauté de la gestion ; ils devaient s’assurer de la régularité des émissions d’actions, d’obligations, de polices d’assurance, et dans certains cas, comme poulies tontines, veiller au placement des fonds en effets publics ; il leur