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comme monnaie internationale. Aucune autre ne réunit au même degré les avantages que l’on doit chercher dans l’unité monétaire : elle est décimale, se prête aisément à tous les calculs, procure une unité assez forte pour satisfaire les exigences raisonnables, et s’adapte mieux encore que la pièce de 25 francs aux systèmes existans. On peut supposer que le résultat final de l’unité monétaire sera de remplacer toutes les monnaies particulières, et de faire qu’il n’y en aura plus qu’une avec ses multiples et ses sous-multiples pour répondre aux besoins des peuples, pris isolément ou dans leur ensemble ; mais il est évident que ce résultat ne s’opérera pas du jour au lendemain, et qu’il faut se préoccuper en attendant d’avoir une monnaie qui ménage la transition, qui se rapproche par conséquent le plus possible de celles qui sont aujourd’hui en cours. Or, je le répète, la pièce de 10 francs a cet avantage mieux encore que celle de 25 francs. D’abord elle est déjà très connue ; elle a pour partisans tous les peuples qui ont adhéré à la convention monétaire de 1865, et qui, réunis, forment un groupe de près de 100 millions d’habitans. Elle est une des divisions monétaires de ce groupe, qui l’apprécie fort, et elle n’aurait pas de peine à se faire accepter comme unité. Vis-à-vis de l’Autriche, elle est un multiple exact du florin ; elle en représente 4. Elle concorde de même avec le rouble russe qui équivaut à 2 1/2. Elle est dans un rapport de 2 à 3 avec l’équation des Allemands, et constitue déjà, depuis l’année dernière, sous le nom de carolin, l’unité monétaire de la Suède. Enfin elle ne s’écarte pas plus de la livre sterling que la pièce de 25 francs ; elle représenterait 8 shillings, dont 20 sont l’équivalent de cette livre, c’est-à-dire qu’il y aurait entre deux fois et demie l’unité monétaire et le souverain anglais la même différence de 2 pence qui fait la difficulté pour la pièce de 25 francs. Quant aux Américains, il n’est pas douteux qu’ils ne se rallient aisément à la pièce de 10 fr. Déjà ils avaient accepté celle de 5 francs à la conférence internationale de 1867, et étaient prêts à modifier leur dollar en conséquence ; ils le modifieraient de même et plus volontiers encore pour une pièce tout à fait décimale et qui leur donnerait une unité plus forte. Il n’y a que l’Angleterre qui résiste ; mais résistera-t-elle toujours ? En lui proposant de ce côté-ci du détroit la pièce de 25 francs pour base de l’unité monétaire, on n’a eu qu’un but, celui de flatter son amour-propre et de désarmer son opposition en lui faisant espérer qu’elle pourrait conserver, au moins nominalement, cette livre sterling qui lui est si chère ; mais si cela est impossible, si l’établissement d’un droit de 1 pour 100 ne compense pas sûrement aux yeux de tous la réduction en poids de 2 pence, s’il faut absolument refondre le souverain pour arriver à la pièce de 25 francs, les Anglais, en tant qu’ils