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qui peut être considérable. M. Jevons, dans une enquête très minutieuse qu’il a faite en Angleterre sur l’état de la circulation métallique, est arrivé à constater qu’il y avait dès à présent, de l’autre côté du détroit, 31 pour 100 des souverains et demi-souverains en circulation qui n’avaient plus le poids légal, que le souverain mettait dix-huit ans environ à descendre au-dessous de ce poids, et le demi-souverain dix ans seulement. C’est la Banque d’Angleterre qui est chargée d’opérer le retrait des pièces trop usées ; lorsque celles-ci arrivent à ses guichets, elle les pèse, en paie le poids, et la perte est pour celui qui les présente. M. Jevons a calculé que des maisons de commerce et de banque de province, car c’est surtout en province que vont les pièces suspectes, avaient perdu ainsi des sommes considérables, 2,000 livres sterling l’une, 4,000 livres sterling l’autre, et plus encore. Peut-on laisser les choses dans cette situation ? M. Lowe ne l’a pas pensé ; il a cru qu’il était du devoir de l’état d’y remédier, et que si l’on faisait tant que de modifier le système monétaire, de prélever un droit pour la fabrication, on devait y ajouter ce qui serait nécessaire pour que le gouvernement prît à sa charge le retrait des pièces trop usées.

Cette partie de la déclaration du chancelier de l’échiquier n’a pas soulevé grande objection ; elle était incidente et accessoire ; l’objet principal, c’était la proposition de diminuer la livre sterling avec la théorie que, moyennant un droit ou seigneuriage, on pouvait regagner en plus-value ce qu’on perdrait en poids. Aujourd’hui, en Angleterre, on ne prélève aucun droit pour la fabrication de la monnaie ; tout individu qui apporte un lingot doit en recevoir exactement le poids en souverains et demi-souverains. Seulement il faut le temps de la fabrication, il y a un délai à courir avant la délivrance de ces souverains et demi-souverains, délai qui entraîne une perte d’intérêt ; on préfère dans la pratique s’adresser à la Banque d’Angleterre, qui paie comptant le lingot qu’on lui apporte, mais qui l’achète légèrement au-dessous de sa valeur : 3 livres 17 shillings 9 deniers l’once d’or, au lieu de 3 livres 17 shillings 10 deniers 1/2 que celle-ci vaut réellement. Cette différence de 1 denier 1/2 par once, ou environ 1/6 pour 100, représente la perte d’intérêt que subiraient ceux qui voudraient attendre la délivrance des souverains et demi-souverains monnayés ; mais elle ne profite pas à l’état. La Banque d’Angleterre seule en tire avantage à cause du privilège qu’elle a de pouvoir mettre en circulation une quantité de billets proportionnelle aux métaux précieux qu’elle possède, qu’ils soient monnayés ou non. Il est donc vrai de dire qu’en Angleterre l’état fabrique la monnaie gratis. En France, depuis 1835, le droit pour la fabrication est de 6 francs 70 cent, par kilogramme d’or à