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enquête, comme celle qui a eu lieu en 1865 sur la monnaie fiduciaire, pour rechercher ce qu’il y a de fondé dans les réclamations qui s’élèvent au sujet du double étalon et de l’unité monétaire ; mais ce qui a donné une importance toute particulière à ces questions et surtout à celle de la monnaie internationale, c’est une déclaration qui a été faite récemment au sein du parlement anglais par le nouveau chancelier de l’échiquier, M. Lowe. « Je crois, a-t-il dit, répondant à une interpellation qui lui était adressée, que la France et l’Angleterre peuvent réaliser le grand avantage d’avoir une monnaie internationale, et je vais montrer à la chambre comment cela pourrait se faire. Les Français se proposent de frapper une pièce de 25 francs en or, 5 francs de plus que le napoléon ; elle vaudrait 22 centimes ou environ 2 pence de moins que notre souverain. Si nous nous décidions à imposer un droit de fabrication, ou seigneuriage, qui serait l’équivalent de ces 2 pence, soit d’environ 1 pour 100, nous pourrions les retrancher du poids actuel de notre livre sterling, et nous aurions une monnaie identique à la pièce de 25 francs ; de plus elle aurait chez nous la même valeur qu’aujourd’hui, car la plus-value résultant du droit compenserait la diminution du poids. Mais, pour atteindre le but, la France devrait faire un sacrifice de son côté, c’est-à-dire élever son droit de monnayage, qui est aujourd’hui de 1/5 ou de 1/4 pour 100 et le porter à 1 pour 100. Si elle s’y décidait, nous aurions résolu le problème d’une monnaie internationale, au moins en ce qui concerne la France et l’Angleterre. » Et M. Lowe ajoutait que ce serait un grand pas de fait dans la voie de la civilisation. Il y mettait toutefois encore une autre condition, c’était que la France renonçât à son double étalon monétaire, et n’eût plus que l’étalon d’or. Autrement, disait-il, il n’y avait pas de solution possible.

Nous ne nous étendrons pas beaucoup sur cette dernière condition, elle est tellement évidente en soi qu’il ne paraît pas nécessaire de la discuter. Posséder le double étalon, ce n’est pas avoir les deux métaux précieux à la fois, pour choisir celui dont on a besoin selon les circonstances ; c’est les avoir alternativement, tantôt l’un, tantôt l’autre, et toujours celui qui est le plus déprécié ; s’il arrive que ce soit l’argent, comment s’entendrait-on avec les pays qui n’ont que l’étalon d’or, avec l’Angleterre notamment ? N’est-il pas curieux vraiment de s’entendre dire du haut de la tribune anglaise que nous sommes, avec notre organisation monétaire actuelle, un obstacle au progrès, et que le double étalon, si cher à quelques personnes chez nous et que l’on voudrait nous faire conserver à tout prix, rend impossible la réalisation de l’unité monétaire ? Il y a lieu d’espérer qu’on sera frappé de ces paroles, et qu’on ne s’obstinera pas