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dans un fourneau ardent y causera un plus grand trouble dans la température que si on la jette dans, une chambre un peu moins chaude que lui… L’état moléculaire du soleil, comme celui de la poudre à canon ou d’un corps fulminant, peut le rendre extrêmement sensible aux impressions externes. »

S’il est permis de faire en quelque sorte l’horoscope des taches solaires, d’en prédire la formation, la croissance et la mort, il n’est pas encore possible de justifier cette étrange périodicité, ni l’influence occulte qu’exercent les planètes. L’opinion des astronomes anglais que nous venons de rapporter n’est pas une explication, ce n’est qu’une induction des plus vagues. Ce problème singulier ne pourrait être résolu que si l’on connaissait l’origine de la chaleur solaire et le lien occulte qui sans doute la rattache au phénomène de la gravité. Depuis que la physique moderne s’est renouvelée par la découverte de la transformation universelle des forces, on sait que chaleur et gravité sont deux modes particuliers de l’énergie répandue dans le monde ; mais on ignore encore de quelle façon la chaleur et la gravité se balancent et se métamorphosent dans le système solaire. Sur ces graves questions, la science n’a pour ainsi dire que des pressentimens ; bornons-nous donc en ce moment aux résultats positifs qui ressortent de ses recherches. Il est démontré que le soleil est bien une nébuleuse condensée, que les vibrations lumineuses émanent non pas de sa superficie, mais de ses profondeurs mêmes, — qu’avant de saillir hors de la couche extérieure de la photosphère, la lumière est déjà dépouillée d’une partie de son énergie et emprisonnée par les atomes des mêmes corps simples que nous trouvons refroidis et combinés sur la terre, — qu’après avoir traversé la photosphère, elle parcourt encore une atmosphère gazeuse, principalement composée d’hydrogène, le corps simple le plus léger que nous connaissions. Cette atmosphère est lumineuse, mais son éclat n’apparaît pas à nos regards, éblouis par la splendeur de la photosphère ; pour la rendre visible, il faut éteindre la lumière solaire dans les prismes du spectroscope. L’enveloppe brillante et l’enveloppe obscure, pour nos sens du moins, de l’astre central ne sont jamais à l’état de repos ; elles sont agitées au contraire de mouvemens perpétuels, manifestés surtout dans la photosphère par les taches, les facules, les granulations du disque lumineux, dans la chromosphère par les prodigieuses éruptions des protubérances. Cette activité incessante et prodigieuse est toutefois soumise à une sorte de périodicité décennale, en même temps qu’enfermée principalement dans les régions équatoriales. Enfin elle semble liée aux attractions lointaines des corps planétaires qui reçoivent du soleil leur chaleur, et qui vivent pour ainsi dire de sa vie.