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REVUE. — CHRONIQUE.

années après la première réforme qu’il passait dans le camp tory, et dès lors il était le chef désigné de tout ministère conservateur.

À l’époque de la grande lutte pour l’abolition de la loi des céréales, il était dans la chambre des pairs, où la mort de son père l’avait appelé, le champion énergique de la cause que lord George Bentink et M. Disraeli défendaient dans la chambre des communes contre Robert Peel. Il a été depuis trois fois aux affaires comme premier ministre, en 1852, en 1858, en 1866, et la dernière fois il était obligé de quitter le pouvoir, vaincu déjà par la maladie qui vient de le tuer. Il y a quelques mois, il avait de la peine à surmonter ses souffrances pour aller livrer un combat suprême dans la chambre des pairs contre la loi sur l’abolition de l’église d’Irlande. Au fond, il était d’instinct plus libéral que les opinions qu’il soutenait. Lord Derby n’était pas seulement un homme public de premier ordre, un orateur politique plein de feu et de ressources, qui a mérité pour ses impétueux élans d’être appelé le « prince Rupert de la discussion ; » c’était un lettré de haut goût, qui a traduit l’Iliade avec un talent supérieur, et qui est resté trente ans et plus chancelier de l’université d’Oxford. Qui lui succédera comme chef reconnu du parti tory ? Sera-ce son fils, lord Stanley, qui a signalé son passage au foreign-office par une ferme habileté dans le maniement des intérêts anglais, et qui va maintenant entrer à la chambre des pairs avec le titre héréditaire de comte de Derby ? Sera-ce M. Disraeli, qui a été un moment premier ministre, il est vrai, mais qui n’a pas peut-être entièrement réussi dans ce poste presque souverain ? Ce sont les événemens qui créent les chefs de parti en Angleterre comme ailleurs. C’est sur le champ de bataille, au feu de la lutte, que se font les premiers ministres, et la sève parlementaire n’est pas près de s’épuiser dans la patrie de lord Chatam, de Canning, de Gladstone et de lord Derby.

CH. DE MAZADE.


Die Naturkrüfte. — I. Licht und Farhe, von F.-J. Pisko. Munich 1869. Oldenbourg.

Lorsqu’il s’agit de vérifier une loi naturelle ou d’en préciser l’expression numérique, le physicien a recours à une expérience : il fait naître à son gré des phénomènes simples, où il est facile de démêler l’influence de chacune des forces qui sont mises en jeu. Il en résulte que les traités de physique s’attachent avant tout à décrire des appareils et à enseigner des procédés d’expérimentation ; mais c’est bien à tort que certains auteurs en arrivent à voir dans ces détails techniques l’essence même de la science, comme si la physique se réduisait à faire jouer des tubes et des robinets, des soupapes et des manivelles. Rien n’est sans doute plus commode que de composer des livres à l’usage du public en