Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 84.djvu/169

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

être établis sans grands frais dans certains pays de montagne. Il en est de même du système Larmanjat, qui fonctionne aujourd’hui sur une longueur de 5 kilomètres entre la station du Raincy et Montfermeil. Ce système consista à faire porter les roues motrices de la machine sur le sol naturel et celles des wagons qu’elle remorque sur un rail unique; on augmente ainsi l’adhérence de la machine tout en diminuant la résistance de la charge. Deux roues, placées l’une devant, l’autre derrière, supportent la voiture; afin que celle-ci puisse se maintenir en équilibre, deux roues latérales qui roulent sur des bandes en bois, mais sans s’y appuyer, lui conservent son aplomb. Les roues du milieu, qui emboîtent le rail, peuvent être abaissées ou relevées à volonté, de façon à supporter seules tout le poids ou à le faire supporter par les roues latérales comme dans une voiture ordinaire. On peut alors y atteler des chevaux et circuler librement sur la route. Ce chemin, établi comme essai, a une rampe de 72 millimètres et des courbes très prononcées; il fait 16 kilomètres à l’heure.

Il est probable que de nouveaux procédés surgiront encore pour l’établissement économique des voies ferrées; mais ce n’est pas tout de triompher des obstacles matériels qui empêchent les hommes de se rapprocher, il faut aussi faire disparaître d’autres obstacles qui s’opposent à de fréquens déplacemens. L’un des plus graves est l’élévation des tarifs. Aux demandes souvent répétées qui leur sont faites à ce sujet, les compagnies répondent par des motifs pleins de raison. Le tarif doit payer, disent-elles, d’abord l’intérêt des capitaux engagés dans l’entreprise, ensuite les dépenses de transport et d’entretien; sur les routes ordinaires, les frais de construction sont payés par l’état, qui n’en réclame pas le remboursement, et les frais de transport seuls restent à la charge des voyageurs. Si l’état voulait consentir à rembourser les capitaux déboursés pour la construction des lignes, il serait possible aux compagnies d’abaisser les prix de 50 ou de 60 pour ÎOO; mais jusque-là il faut bien admettre qu’elles s’indemnisent de leurs sacrifices. Or réclamer à l’état les frais de construction, c’est les demander aux contribuables et par conséquent commettre une injustice, car il est beaucoup plus juste de les faire payer à ceux qui se servent des chemins de fer qu’à ceux qui ne s’en servent pas. Elles font remarquer enfin que les tarifs sont le résultat d’un contrat mutuel, et que abaisser les prix contre leur gré serait une véritable spoliation.

Ces argumens sont très sérieux, mais nous pensons que les compagnies elles-mêmes trouveraient leur avantage à une réforme dont le résultat inévitable serait la multiplication des voyages et l’accroissement du trafic. Ce n’est là qu’une simple conjecture; pour-