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l’éducation, et vous changez la face du monde, » cette perspicacité lucide qui écarte tous les élémens inutiles et parasites pour s’attacher à ne faire saillir que les os et les nerfs mêmes du sujet.

Dans son introduction, M. Michelet se réjouit du récent réveil de la liberté et de la justice, en songeant qu’à l’heure présente nous sommes bien moins qu’en février 48, « crédules et chimériques. » Je crois comme lui que les dures leçons que l’expérience a infligées à nos aînés ne seront pas perdues pour nous ; mais alors pourquoi M. Michelet lui-même dans maint passage de Nos Fils ressuscite-t-il certaines visées toutes chimériques ? Je fais allusion, par exemple, à ce qu’il appelle les fêtes solennelles d’une société démocratique et au développement sentimental sur le 2 novembre. Ne dressons pas ainsi d’avance un calendrier fantaisiste. Que M. Michelet se garde de l’erreur qu’il signale chez d’autres. C’est fort à propos qu’il critique les agapes pseudo-religieuses des saint-simoniens, leurs parades sacerdotales et tout leur vain appareil mystique ; il ne faut pas en effet rappeler le citoyen au forum pour lui faire adorer la déesse Raison sur son char : c’est dans son cœur que chacun de nous, pour parler la langue convenue, lui doit dédier un autel.


JULES GOURDAULT.



ESSAIS ET NOTICES.

UNE NOUVELLE MALADIE DE LA VIGNE
LE PHYLLOXERA STRATIX.
I. Rapport de la commission nommée par la Société des agriculteurs de France pour étudier la nouvelle maladie de la vigne, par M. L. Vialla ; 1869. — II. Notes entomologiques pour faire suite au rapport de M. Vialla, par MM. Planchon et Lichtenstein.


Depuis quelques années, la viticulture française subit de bien rudes épreuves ; après l’oïdium, contre lequel on n’a pas encore trouvé de remède assuré, mais dont on avait su du moins prévenir souvent les ravages, voici qu’un nouveau mal, aux allures étranges, envahit la vallée du Rhône, grandit rapidement, gagne de proche en proche, et menace aujourd’hui jusqu’au Bordelais. Quelques symptômes précurseurs avaient été signalés en 1866 et surtout en 1867 ; mais c’est pendant l’été de 1868, après un rude hiver suivi de chaleurs peu communes, que sévit le fléau dont l’intensité n’a fait depuis qu’augmenter. Aux yeux du vigneron, aux yeux même du passant, le spectacle est plus douloureux encore que ne l’était celui des effets de l’oïdium. La vigne était vivante et belle ; tout d’un coup les feuilles jaunissent, les sarmens deviennent noirs et rabougris, les souches meurent, et, si on les arrache, on trouve les racines pourries. Une singulière particularité, c’est que tous les ceps