leur peuple, n’offrent aucun point d’attache avec cette catastrophe.
Pour achever de caractériser les idées religieuses prêchées par les prophètes du VIIIe siècle, il est nécessaire de savoir jusqu’à quel point elles étaient celles de leur peuple. C’est ici surtout qu’il faut user de précaution. D’abord, et c’est un fait essentiel à relever, les prophètes ne sont jamais contredits dans leur affirmation que Jehovah est le dieu d’Israël. Il est visible, démontré par une foule de détails, que cette croyance fait partie de la conscience nationale ; mais il n’est pas moins évident que la majorité des Israélites de leur temps se fait de Jehovah une autre idée qu’eux, persiste à l’adorer sous des symboles visibles, et de plus adore d’autres divinités conjointement avec lui. Si donc les prophètes sont d’accord avec la croyance générale tant qu’ils se bornent à parler d’un rapport intime et spécial entre Israël et son dieu Jehovah, ils ne représentent plus qu’une minorité quand ils parlent en monothéistes et en ennemis déclarés de toute idolâtrie. Cette première observation démontre que, contrairement aux idées vulgaires, il y avait en Israël, pendant la période des rois, plusieurs manières d’être jehoviste, et que le jehovisme le plus répandu n’avait rien d’inconciliable avec l’idolâtrie et même le polythéisme. Nous voyons par les écrits des prophètes que le culte licencieux et barbare de Baal, le culte plus austère, mais peut-être plus cruel encore de Moloch, l’adoration de Jehovah lui-même sous la forme d’un jeune taureau de métal fondu, étaient en possession des sympathies du grand nombre. Les femmes surtout paraissent avoir été obstinément païennes. Il y avait donc chez la majorité un mélange d’idées contradictoires. Par une lente transition, on passait alors en Palestine d’un ensemble de croyances polythéistes et naturalistes à un vague monothéisme encore idolâtre, et de celui-ci à un monothéisme sévère. Voilà l’état de choses qu’il s’agit d’expliquer, les trois courans devenus parallèles dont il faut retrouver la source commune. Puisque la difficulté est surtout de démêler la genèse du monothéisme, n’avons-nous pas le droit de nous armer du principe, vérifié partout, que la croyance la plus pure s’est dégagée d’un milieu qui la contenait antérieurement en germe mêlée à des élémens disparates, et que ce progrès ne s’est accompli d’abord que chez une minorité d’élite, tandis que la majorité restait plus ou moins attachée à ses anciennes superstitions ? Cette supposition si naturelle jetterait un grand jour sur l’histoire antérieure à cette époque, et il vaut la peine de rechercher si les faits la justifient. Eh bien ! nous savons à quelle famille de religions appartiennent les cultes et les croyances de la majorité des Israélites du VIIIe siècle. Si donc nous prenons la foi religieuse des prophètes de ce siècle comme le point d’arrivée de