réunion du corps législatif ? Ils se placent tout simplement entre une déconvenue, qui peut n’être que risible, et l’insurrection, qui n’est pas dans leur pensée. C’est une agitation de fantaisie qui ne peut conduire à rien et qui dénote plus d’impatience que de sens politique, qui a même le tort de laisser voir une foi peu assurée dans les destinées libérales de la France. Ceux qui se proposent ainsi de refaire le serment du jeu de paume en 1869 croient-ils donc si peu à la puissance du mouvement actuel qu’ils le voient en péril parce que le corps législatif ne sera réuni que le 26 novembre au lieu d’être rassemblé le 26 octobre ? Ce mouvement est désormais assez fort, assez irrésistible, pour s’imposer par lui-même, pour être au-dessus de toutes les hostilités et des mauvaises volontés, s’il y en avait. Aussi pour notre part n’attachons-nous que la plus médiocre importance à tous ces bruits de coups d’état, de réactions nouvelles, de listes de proscription, qui ont passé dans l’air assez récemment, et qui ont même fait le tour de l’Europe. On ne recommence pas des coups d’état à volonté, tout comme on ne passionne pas le pays à volonté pour des questions secondaires. Le gouvernement peut voir par là cependant ce qu’aurait de dangereux un ajournement mal défini du corps législatif, et c’est là justement ce que nous appelons la question d’opportunité. Le gouvernement est le premier intéressé à ne pas laisser les esprits flotter dans l’incertitude et s’égarer dans les soupçons, à préciser ce terrain nouveau créé par le dernier sénatus-consulte, à se retrouver aussitôt que possible en face d’un parlement rajeuni, devant lequel il est désormais responsable. Jusque-là, on vit dans le provisoire, dans une attente que nous ne voulons pas dire fiévreuse, mais qui peut devenir agaçante et finir par énerver d’avance cette situation nouvelle où tous les pouvoirs vont se rencontrer. Jusqu’à la réunion du corps législatif, on ne peut rien et on ne fait rien. Il faut excepter toutefois M. le ministre de la guerre, le général Lebœuf, qui vient de supprimer le régiment de gendarmerie de la garde impériale et de publier deux rapports, dont l’un contient une déclaration de quelque valeur : c’est que, contrairement aux vues qu’on avait prêtées au nouveau chef de l’armée, la garde mobile sera maintenue. Le général Lebœuf accepte l’héritage de cette création du maréchal Niel, qu’il appelle même une « institution précieuse, » bonne à conserver pour la force du pays. — Mais enfin ce n’est pas tout pour nous de savoir ce que devient la garde mobile, le ministère a bien d’autres choses à nous apprendre et bien d’autres choses à faire. Il y a toute une politique à créer, la politique du régime de l’empire libéral, par l’accord des pouvoirs publics délibérant au sein des garanties nouvelles. C’est là le vrai rendez-vous auquel personne ne peut manquer désormais.
Que l’opinion s’attache de préférence à tout ce qui constitue ce travail intérieur, c’est assez simple, et il en sera ainsi tant que le mouvement